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23/08/2011

Les ombres, de Philippe Bérenger

les-ombres.jpgUne chronique de Bruno.

Voilà un roman qui sort vraiment de l’ordinaire. Le genre de bouquin qui vous attrape par le col et vous projette au milieu d’une histoire où vous avez l’impression non pas d’être le lecteur, mais le témoin privilégié d’un drame qui va se jouer sous vos yeux.

Oubliez tout ce que vous croyez savoir de l’univers des flics, ou plus précisément de ces agents chargés de la surveillance du territoire, garants de la sécurité d’une société insouciante des dangers auxquels elle est exposée.

Délaissez l’imaginaire cinématographique hollywoodien et l’univers des séries U.S qui regorgent de technologies et d’hommes affutés à tous les genres de combats. Cette réalité esthétique de papier glacé n’a rien à voir avec celle que nous propose Philippe Bérenger.

Lyon. La deuxième bombe éclate. Un « croissant noir » pour nom, une troisième bombe pour menace. Aucune piste. La société est aveugle, un mouton paranoïaque qui ne sait pas d’où viennent les coups. Où chercher ?

Les différents services de police et de renseignements sont sur les dents ! Chacun surveille son secteur en croisant les doigts que ca ne vienne pas du sien. Pour le capitaine Frank VENEL la course contre la mort est engagée. De supputations en renseignements, de filatures en recoupements, son équipe court plusieurs poissons à la fois sans savoir vraiment ce qui remontera à la surface.
 Quand enfin l’intuition laisse la place aux certitudes, c’est avec le tic tac de la troisième bombe dans la tête que VENEL tentera d’avorter le troisième attentat en gestation.

Ce roman est saisissant de réalisme. Philippe Bérenger nous plonge dans le quotidien de flics qui pour mettre en échec l’ennemi n’ont que leur sens de l’observation et leur patience pour seules armes. Car ici pas ou peu de technologie, en dehors de balises servant à suivre des véhicules à distance.

Ce roman démystifie le flic plongé dans l’action permanente et bardé de moyens. Car la réalité est tout autre, faite de journées entières à planquer dans un appartement pour surveiller un quartier, une rue, un immeuble. Un travail laborieux, des heures d’attente peu gratifiantes, où le sens de l’observation peut faire la différence et soulever un début d’affaire, ou saisir l’esquisse d’une piste.

A travers ses mots, Philippe Bérenger nous décrit des hommes qui ont tout de l’anti-héro , avec leurs doutes, leurs fêlures, leurs espoirs , leurs frustrations et les résignations d’une vie liée à un boulot qui fait d’eux des ombres, observant le monde évoluer sous leurs yeux, témoins de la décrépitude d’une société qui fabrique de la misère et laisse les plus démunies à la merci de la loi du plus fort.

Des personnages attachants, parfois bouleversants d’humanité, à l’image du capitaine VENEL qui entretien avec sa fille, adolescente rebelle au caractère déjà bien trempée, une relation rude mais pleine de tendresse. Un homme qui, face à la violence qui se déchaine aveuglément a besoin terriblement d’aimer.

Autant de personnages, autant de portraits hors du commun qui donne à cette équipe un visage.

Mais la réussite de Philippe Bérenger, c’est aussi d’arriver par son style court et rythmé à nous transmettre cette atmosphère d’urgence, cette pression de plus en plus forte à mesure que le temps s’égraine mais que l’équipe ne trouve pas. Une pression étouffante que le lecteur ressent au fil des pages.

Sans doute l’entame de la lecture de ce roman est un peu déroutante pour le lecteur. Le style est direct, le langage celui de la rue. De nombreux personnages interviennent, avec qui il convient de faire connaissance.

Mais très vite on se laisse embraquer par l’histoire, le lecteur devient un membre de l’équipe. Par contre, l’introduction tout au long du roman d’extraits de procédures à suivre en fonction des situations auxquelles est confronté un agent de police  ne me semble pas pertinente. Le roman aurait gagné en fluidité en leur absence.

Voilà en tout cas un roman qui aura touché au but. Surpris par le thème abordé, je n’en ai été que plus séduit par l’histoire qui m’a été proposée, loin des clichés habituels.

A travers son roman, peut être devons nous comprendre que ce n’est pas forcément dans l’idéologie de l’intolérance et de l’extrémisme que prendront corps les bombes de demain, mais peut être bien dans les plis de la misère et du désespoir que notre société engendre.

Philippe Bérenger a en tout cas des choses à raconter, et il le fait de fort belle manière. Gageons que son prochain roman vienne confirmer cette excellente première impression.

Le blog de Bruno : http://passion-polar.over-blog.com/

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