29/01/2014
Entretien avec Pierre Willi
Après avoir lu et chroniqué son roman l'herbe noire, Cassiopée a souhaité poser quelques questions à Pierre Willi, qui s'est aimablement prêté à cet exercice.
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Cassiopée. Si je vous demande une couleur et un objet pour vous présenter, que choisissez vous et pourquoi?
Pierre Willi. La couleur orange. Où le jaune et le rouge se retrouvent, l’énergie, la passion, le feu, le sang, la vie.
Une cafetière.
Cassiopée. On a l'habitude de dire que l'herbe est toujours plus verte chez les autres... Pour vous, elle est noire, pourquoi?
Pierre Willi. Dans ce récit, elle est noire… puisqu’il s’agit d’un roman noir. Mais je n’écris pas que des choses noires. Mes romans précédents portent tous une grosse charge d’humour.
Cassiopée. Vos personnages sont entraînés bien malgré eux dans un road movie sanglant, pensez vous qu'on ne tient pas les rênes de sa vie ou très peu?
Pierre Willi. Il y a toujours la possibilité du choix. Paulin est obnubilé par une idée fixe : fuir. Il voudrait « s’envoler comme un aigle » lui qui se sent crapaud. Beaucoup d’adolescents piégés dans un univers étriqué où ils ne peuvent s’épanouir, où la frustration est la règle, ont le même désir sans forcément passer à l’acte. Parfois, nous avons des choix à faire, à un croisement, prendre à gauche ou à droite, choisir la route de Parici ou de Parlà. Nous ne mesurons pas toujours l’étendue des conséquences de nos actes surtout quand nous cédons à une pulsion. Paulin cède à une pulsion, il fait le mauvais choix au mauvais moment. À partir de là c’est l’engrenage, il ne contrôle plus rien. Il est bien sûr victime des circonstances et d’un contexte économique et familial difficile (le village est condamné par l’aveuglement des technocrates européens) mais il est responsable de son choix.
Gabriel avait fait le mauvais choix bien avant de débarquer à Trenouille. La vraie victime, c’est Nadège qui concentre en elle tout le poids du naufrage social et familial.
Cassiopée. J'ai lu que vous aviez délaissé la voile pour peindre et écrire, avez vous trouvé dans la peinture et l'écriture d'autres formes d'évasion, de solitude, d'accomplissement personnel ?
Pierre Willi. L’écriture ne correspond pas à un désir de solitude. Même s’il s’agit d’un travail solitaire, il est entièrement tourné vers les autres. Quand j’écris, je pense au lecteur, en espérant qu’il prendra plaisir à me lire (d’où un énorme travail d’écriture).
Si j’ai effectivement traversé l’Atlantique en solitaire, la solitude n’était pas une fin en soi.
Actuellement, je suis plutôt sédentaire. La créativité est un voyage intérieur. « L’accomplissement » c’est d’offrir ce voyage au public (quand je donne un spectacle de contes, lors d’une exposition, ou quand je publie un livre).
Cassiopée. Pourquoi écrivez-vous?
Pierre Willi. J’ai un besoin vital de créer, que ce soit, écrire, peindre, jouer de la musique, détourner des objets de leur vocation. Il se trouve que là où je suis le plus à l’aise c’est la peinture et l’écriture.
Cassiopée. Qu'aimez vous lire et pourquoi?
Pierre Willi. Je lis de tout ! J’ai eu la chance d’avoir accès très tôt à la lecture et lire fait partie de ma vie.
Je déteste la télévision (euphémisme) et je ne peux me passer des livres.
Cassiopée. Vous avez eu plusieurs métiers, considérez vous que vous avez eu "plusieurs vies"?
Pierre Willi. On peut le dire. J’ai tenté plusieurs ouvertures sans jamais trouver mes marques. On m’a longtemps pris pour un instable alors que j’avais une idée fixe : m’acheter un bateau pour traverser l’océan. Aucun des métiers où je tentais ma chance ne me plaisait (euphémisme). J’avais la sensation de me perdre. Finalement c’est chez les routiers que je me suis senti le plus à l’aise, peut-être parce que ce métier était à l’époque hors-norme.
En revanche, ces expériences multiples me sont très profitables aujourd’hui pour mon travail d’écriture.
Cassiopée. On ressent une grande puissance entre les lignes de votre roman, comme si les mots (les maux?) cachés entre les lignes ne demandaient qu'à sortir, la souffrance est-elle plus forte lorsqu'elle est silencieuse?
Pierre Willi. Je ne sais pas, je poserai la question à mon psy. Un romancier doit être capable d’empathie envers ses personnages, et les aimer, tous, sans exception, avec leurs défauts. Il doit se glisser dans leur peau, dans leur esprit, ce qui ne veut pas dire qu’il leur prête ses propres tourments !
Cassiopée. Votre roman m'a beaucoup plu, à quand le prochain?
Pierre Willi. J’ai un roman policier en lecture chez les éditeurs, et trois autres dans un tiroir qui attendent que je les retravaille, plus des nouvelles policières et des contes fantastiques qui verront peut-être la lumière des pages d’imprimerie, un jour… Et une montagne de projets !
17:07 Publié dans 07. Les plus récents entretiens avec des auteurs | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : pierre, willi, entretien, cassiopée, interview | Facebook | |