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12/12/2012

Le Cercle, de Bernard Minier

cercle.jpgUne chronique de Jacques.

Pendant la lecture de ce livre, je me suis demandé pourquoi je n’arrivais pas à m’en détacher, quels étaient les ingrédients qui le rendaient aussi prenant, aussi envoutant. La qualité de l’écriture ? La profondeur des personnages ? La subtilité de l’intrigue ? Sans doute, comme toujours pour les très bons romans, est-ce un mélange de tous ces éléments.

 Imaginez un flic encore jeune (la quarantaine), passionné de littérature et de musique classique. Plus généralement, épris de culture. Un flic superbement doué pour l’écriture mais qui a laissé de côté la vocation d’écrivain qui était la sienne pendant son adolescence. Il l’a mise entre parenthèses, mais il y pense. Souvent. Qui sait si un jour... ?

 Imaginez ce flic à vingt ans. Un jeune homme qui entame avec enthousiasme une formation littéraire à Marsac, petite ville universitaire du sud-ouest de la France. Le lycée, la classe de Khâgne, des lectures, les discussions interminables, les profs qu’il admire et lui apportent une ouverture au monde à travers la littérature et la philosophie, le groupe d’amis avec qui il découvre ce même monde, Francis l’ami avec qui il entretient des rapports privilégiés. Et naturellement un amour violent, unique, irrésistible : Marianne, qui ne peut être que la femme de sa vie. Qui l’aime, lui le jeune homme méconnaissant son propre charisme. Marianne qu’il aime lui aussi, avec passion. Et puis la double trahison, impensable. Marianne qui le quitte pour Francis et bouleverse ainsi à jamais sa vie.

 Ce flic, que j’ai adoré côtoyer pendant les 650 pages du roman, c’est Martin Servaz, chargé d’une enquête criminelle qui va le replonger sur les lieux d’un passé qui lui colle à la peau comme une plaie ouverte, jamais cicatrisée, impossible à refermer totalement. Une enquête qui le ramène à Marsac et va raviver des souvenirs douloureux, puisque Martin va y retrouver Francis et Marianne, maintenant séparés.

 Cette plongée dans le passé, qu’il n’a pas recherchée et ne souhaitait pas, va-t-elle lui permettre de guérir de cette sourde maladie de l’âme ? Peut-on guérir d’ailleurs de son adolescence ? Comment vivre dans le présent, renouer avec sa fille Margot, régler ses comptes avec de vieilles jalousies et rancœurs qui vingt ans plus tard n’ont plus guère de sens ? Ce sont certains des enjeux du roman, étroitement mêlés à l’intrigue policière.

 L'intrigue mêle étroitement les trois protagonistes d’antan, puisque le fils de Marianne est soupçonné de l'assassinat d’une jeune enseignante de son lycée, Claire Diemar. Un lycée dans lequel enseigne aussi son ex-ami Francis, qu’il décrit comme spirituel, redoutable et arrogant mais qui lui aussi s’avèrera plus complexe que ce que les souvenirs de Martin pouvaient nous le laisser penser.

 Sa recherche de l'assassin de Claire va ainsi être ponctuée par ses rencontres avec les fantômes bien réels de ce passé refoulé, mais aussi par ses relations avec la nouvelle génération, Margot et Hugo étant amis et élèves dans le même lycée, tout comme avant eux Marianne et Martin l’avaient été. Hugo, ce jeune homme mystérieux dans lequel Martin pourrait se reconnaitre...qui est-il ?

 L’enquête va le conduire jusqu’à un mystérieux « Cercle », qui pourrait être responsable de la mort de Claire Diemar... à moins que le responsable ne soit Hirtmann, psychopathe machiavélique pourchassé jadis par Martin et qui rode autour des lieux, comme fasciné par la présence du policier.

 C’est sans doute le seul reproche que je ferais à ce remarquable roman : alors que l’intrigue policière est bien ficelée, alors que le lecteur est suspendu à une enquête menée avec doigté et habileté par le héros, l’auteur a ajouté un personnage qui n’ajoute rien à l’intrigue où à la trame romanesque. Un personnage plaqué et artificiel, dont le seul intérêt semble être de préparer une suite au roman en maintenant intact le suspense jusqu’à la dernière page.

 Mais ce reproche est mineur si je le mets en rapport avec la qualité d’écriture et de construction de ce roman. Bernard Minier a créé avec Martin Servaz un personnage aussi complexe qu’attachant, et j’ai retrouvé avec Le Cercle le même plaisir de lecture que j’ai eu avec les premiers Grangé.

 Je souhaite évidemment à Bernard Minier de ne pas choisir la pente glissante de son illustre devancier et de continuer à nous surprendre dans ses prochains livres. La règle est simple : si quelque chose fonctionne bien, éviter de le répéter dans un autre roman, car les ficelles s’usent très vite et lassent aussi vite le lecteur. S’il ne tombe pas dans cette facilité, nul doute que son talent lui permettra de se retrouver parmi les meilleurs auteurs de polars de la décennie !

  Jacques, (lectures et chroniques)

Le cercle
Bernard Minier
XO éditions (octobre 2012)
572 pages
20,90 €

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