23/06/2022
Omerta, de R.J. Ellory (City of Lies)
Une chronique de Cassiopée
Vincit omnia veritas *
Sorti en 2006 en anglais, « Omerta », de son titre original « City of Lies » (la ville des mensonges) fait partie des premiers romans de R.J. Ellory. C’est pourtant, seulement en 2022, qu’il est édité en français pour la première fois.
La traduction du titre en anglais reflète bien l’atmosphère de ce récit. Chaque vérité d’un instant peut devenir un mensonge la minute suivante. John Harper en fait les frais et ne sait plus qui croire et à qui faire confiance. C’est un homme encore jeune. Il a écrit un premier livre et bute désormais devant la page blanche. Ses deux parents décédés, c’est à New-York que sa tante (avec qui il n’a plus de contact) l’a élevé. Il vivote maintenant à Miami avec un petit boulot de journaliste en attendant de retrouver l’inspiration. Il s’accommode de ce quotidien. Un coup de fil vient tout bouleverser. Sa tante lui demande de venir au plus vite et elle refuse de donner des explications au téléphone.
Peu motivé, il se décide cependant et part, persuadé qu’il sera de retour dans quelques jours. Arrivé sur place, c’est le choc, il découvre que son père, Lenny Bernstein, n’est pas mort. Il vient d’être blessé par balle et est hospitalisé. Mais surtout, c’est un des chefs de la mafia du coin. Pourquoi ce mensonge ? Il interroge celle qui l’a recueilli mais n’apprend pas grand-chose. Walt Freiberg, un vieil ami de la famille, accompagné de Cathy, le prend en charge, le guide (un peu trop ?), le conseille (dans quel but ? John n'est plus un petit garçon), le protège, le manipule ? Finalement, dès le début, le lecteur se demande si ce Walt n’en fait pas un peu trop dans le style « je suis là, je t’aide mais fais plutôt ce que je te conseille sinon…. ». C’est le genre d’homme qui attire la lumière mais qui noie le poisson quand on le questionne…..
On pourrait penser que John est naïf car il se laisse « emprisonner » dans cette relation. C’est plutôt qu’il est désemparé, il ne sait pas comment se comporter, que dire, que faire alors il « suit » Walt. Parfois, il se « rebiffe », essayant de reprendre son quotidien en mains et ça m’a bien plu.
« Il avait décidé de se laisser porter par les événements, d’en suivre le cours jusqu’au moment où cela deviendrait intolérable et où il jugerait bon de mettre le holà. »
On comprend vite qu’il est confronté à des menteurs professionnels mais, comme John, on n’arrive pas à cerner les individus. Il y a bien ce flic Frank Duchaunak, qui distille quelques informations au compte-gouttes mais a-t-il raison ? Enquêtant sur Lenny jusqu’à l’obsession, n’a-t-il pas une vision déformée des faits ? J’ai énormément apprécié John et Franck, ils sont intéressants dans leur façon d’aborder la vie, les aléas, dans leur besoin de déchiffrer ce qui leur échappe.
Au fil des pages, John va perdre ses illusions, sa candeur, il prend de plein fouet certaines révélations et il sent qu’il dérange. La mafia, dont les ennemis de son paternel, se demande ce que ce fils tombé du ciel (personne ne connaissait son existence) sait ou ne sait pas, ce qu’il veut, ce qu’il a compris etc… Et lui, John, il veut entrevoir un peu plus qui était son géniteur, au risque d’être déçu, bouleversé, perdu….
C’est d’ailleurs ce qui domine dans ce recueil, le cheminement de John, une route solitaire qu’il n’a pas toujours envie d’emprunter mais qu’il prend pour cerner son père, ses affaires, jusqu’à l’inéluctable…. Va-t-il choisir de fuir, de faire face ? Tout ce qu’il savait a été détruit, il doit se reconstruire avec une famille qui n’existait pas….
Avec une écriture précise (merci pour la traduction), l’auteur prend le temps d’installer les personnages, l’atmosphère. Il y a une réelle recherche pour l’aspect psychologique de chacun. On ressent l’ambiance mafieuse, les tromperies, les faux semblants… J’avais peur pour John qu’il tombe de haut et ne se relève pas.
Fan de R.J Ellory, je suis enchantée de cette lecture. Certains esprits chagrins parleront peut-être de longueurs, mais que ce soit les dialogues (bien pensés), les descriptions, ou l’analyse des situations, l’auteur sait captiver son lectorat. Alors chapeau bas !
*La vérité triomphe toujours…..mais à quel prix ?
Traduit de l’anglais par Claude et Jean Demanuelli
Éditions : Sonatine (2 Juin 2022)
ISBN : 978-2355842948
600 pages
Quatrième de couverture
Écrivain à la dérive, John Harper vient d'apprendre une nouvelle qui le bouleverse : son père, qu'il n'a jamais connu et croyait mort depuis longtemps, est bel et bien en vie. Il se trouve dans un hôpital de Manhattan où l'on vient de le transporter, à la suite de graves blessures par balles. John n'est cependant pas au bout de ses surprises : son père n'est pas n'importe qui, puisqu'il s'agit de Lenny Bernstein, l'un des pontes de la mafia new-yorkaise. Bien vite, John va découvrir que si son passé a été bâti sur des mensonges, son présent l'est tout autant.
23:26 Publié dans 02. polars anglo-saxons | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook | |