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23/01/2014

L'Herbe noire, de Pierre Willi

herbe_noire.jpgUne chronique de Cassiopée 

 Sombre et très noire, comme la couverture du livre, cette histoire est portée par une écriture surprenante au premier abord. Alternant le « je » d’un des principaux protagonistes et la troisième personne du singulier pour évoquer d’autres faits, l’auteur nous emmène dans un univers restreint, celui de quelques familles dans une campagne plutôt perdue, ce que certains nomment « le trou du cul du monde ».

 Paulin raconte avec ses mots et son vocabulaire d’adolescent. Il rentre au village car c’est la fin de l’année scolaire. Ses parents ? Ce n’est pas simple... Ses amis ? A-t-on des « amis » quand il y a peu de personnes autour de vous ? Ne s’agit-il pas plutôt de voisins, de connaissances que vous appelez « amis » pour combler le vide ?

Heureusement, il y a Nadège… Paulin lit en elle comme dans un livre ouvert, il vaut mieux car elle ne parle pas et communique très peu…. En ville, on prendrait peut-être le temps d’essayer de l’aider. On expliquerait qu’elle est sans doute autiste et qu’il y a des solutions pour aller mieux …Mais là…pas le temps, pas le moment….et puis, si c’était elle qui avait choisi de se taire ?

 Le début du roman peut désarçonner, l’alternance des deux styles, le plus souvent dans un même chapitre et sur des paragraphes courts peut surprendre et donner une impression de confusion, le lecteur se demandant qui intervient. Une fois, le principe « adopté", on s’aperçoit que ce fonctionnement donne de la profondeur au texte. Les points de vue sont multiples et ne se cantonnent pas à un personnage. De plus, cela permet de varier le vocabulaire et de ne pas rester « fixé » sur Paulin.

 Paulin est jeune, il a les défauts de la jeunesse, il essaie d’être « bien » mais ce n’est pas toujours évident…..

« J’ai bien essayé de me fabriquer une auréole, avec des restes d’éclair ramassés pendant une nuit d’orage, mais il faut se promener avec une batterie pour l’alimenter et qu’elle brille…. »

 Le désœuvrement, les fréquentations, les petites guerres de « clans » entraînent des dérives, pas importantes au début mais qui, de fil en aiguille, à cause de mauvais concours de circonstances, peuvent avoir des conséquences dramatiques.

Paulin et ses compagnons vont ainsi se trouver embarqués dans une tourmente qu’ils ne dominent pas.

« Tuer les gens qu’on aime, ce n’est pas les tuer. C’est détruire leur image pour ne pas la perdre et la garder pour soi toujours. »

 Dépassés par les événements, embourbés devant les problèmes, paniqués par la non-maîtrise de situations aux renversements plausibles mais étonnants, ils n’ont plus rien pour espérer une amélioration…..

 Malgré sa noirceur, j’ai beaucoup apprécié ce roman. Pour plusieurs raisons :

 -         L’écriture et le style (parfois poétique malgré son côté obscur) particuliers mais intéressants.

-         De plus, l’auteur à travers cet opus, aborde un fait de société important : l’inactivité des jeunes qui peut les transporter dans des situations qu’ils n’ont pas souhaitées, où le monde ne répond pas à leurs attentes et où ils finissent par s’enfoncer dans la délinquance ou plus simplement le mal-être….

-         Le contenu des chapitres. En effet, au-delà de la narration, on trouve dans le récit, une approche "fine" des personnages, notamment de ceux qui sont dans l’ombre mais dont l’attitude peut expliquer la partie visible de l’iceberg.

-         Le dernier point et ce n’est pas un des moindres, c’est tout ce qui peut se ressentir à cette lecture. Je veux dire par là, qu’à mon sens, il y a des choses à découvrir entre les lignes. Pas forcément un message caché mais une atmosphère, une ambiance….une de ces ambiances qui vous colle à la peau une fois le livre refermé et vous laisse pantelante dans votre canapé….le poids des mots…..sans doute…

Cassiopée

 

 

Titre : L'Herbe noire
Auteur : Pierre Willi
Éditions : Krakoen
Date de parution : 01/01/2014
ISBN : 9782367940366
Nombre de pages : 270

 

Quatrième de couverture

"Je rêvais de fuir les adultes et toute cette boue qui nous empoisonnait le sang. Je rêvais de partir loin, très loin, et de ne plus jamais revenir. Mais le rêve a rejoint la réalité, il est devenu cauchemar..." En retraçant la cavale sanglante de trois adolescents qui s'ennuyaient dans une ferme du Limousin, Pierre Willi tresse les fils d'un drame inexorable.