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11/07/2013

"Donne-moi ton coeur", de James Hayman (chronique 2)

donne_moi_ton_coeur.jpgUne chronique d'oncle Paul.

Il parait que le sport, c’est bon pour la santé. Il parait ! Car James Hayman nous démontre le contraire. Suivez le guide !

Ce soir-là, tandis qu’il se rend dans un restaurant italien en compagnie de Kyra sa compagne, le chef de la brigade criminelle de Portland, dans le Maine, Michael McCabe ne pensait pas avoir à son menu du cœur. D’habitude il se régale d’un plat simple, un steak bleu à la new-yorkaise tandis que Kyra se délecte des spécialités du chef. Il est vrai que Kyra est artiste peintre et elle aime les couleurs tandis que McCabe est un intellectuel, détaché des nourritures terrestres. Intellectuel, c’est peut-être dire vite, mais il possède une mémoire d’éléphant, capable de réciter mot pour mot des passages d’un livre lu quelques mois auparavant. Tandis qu’il termine son apéritif, immuablement un whisky, il est appelé au téléphone par son adjointe Maggie. Le corps d’une adolescente a été découvert par un ivrogne dans une décharge de ferraille.

Arrivé sur place, il constate, et cela avant même que la médecin légiste Terri Mirabito soit arrivée, que l’adolescente est décédée et que plus rien ne pourra la ressusciter : son thorax a été ouvert proprement et longitudinalement et son cœur a été extirpé. A quelles fins (non, pas à quelle faim !) ? Il relève d’autres indices, d’absence d’une boucle d’oreille et des traces de brûlures sur la poitrine et les cuisses. Bientôt il a la confirmation que ce cadavre est celui de Katie, une adolescente de seize ans, sportive et joueuse de football, disparue depuis une semaine.

Et comme si cette affaire ne suffisait pas, une autre non moins inquiétante se profile. Lucinda, une jeune femme de vingt-sept ans, s’est fait enlever alors qu’elle effectuait son entrainement matinal, sur un chemin en bordure du fleuve, en compagnie de son chien Fritz, afin de participer sous peu à un dix kilomètres. Pas de témoins, car à cette heure matinale rares sont ceux qui courent dans le brouillard. Sur place McCabe procède, au péril de sa vie, aux premières inspections. Une casquette de base-ball appartenant à la joggeuse est retrouvée ainsi que le cadavre de son animal plusieurs mètres plus bas dans la pente qui rejoint la berge du fleuve.

Un lien pourrait être établi entre ces deux disparitions et McCabe et son équipe espèrent pouvoir retrouver son ravisseur afin que Lucinda ne connaisse pas le même sort que Katie. Opiniâtre McCabe suit plusieurs pistes à la fois. Celle du petit ami de Kate, avec lequel elle s’était disputée, n’est pas à écarter, mais il privilégie toutefois celle d’un spécialiste de la découpe. En premier Spencer, chirurgien spécialisé dans la transplantation cardiaque à l’hôpital de Portland. Il rencontre l’homme de l’art qui lui fait mauvaise impression et remarque accrochée dans son bureau une photo le représentant en compagnie de trois amis. L’attitude de Spencer sur ce cliché regardant l’un de ses compagnons est assez ambiguë. Spencer a du répondant et argue que si McCabe continue à l’importuner, il va en référer à son chef, le commandant Shockley. Tous deux font partie du même club mais cela n’impressionne guère le policier qui en a vu d’autres.

Un petit génie de l’informatique travaillant dans les services de police parvient, en visionnant la vidéo qui surveillait la décharge, à discerner des éléments utilisables pour réduire le champ des possibilités en ce qui concerne la véhicule ayant servi à transporter le corps ainsi qu’à donner un signalement approximatif de l’homme qui a déposé le cadavre de Katie. Ce n’est pas grand-chose mais il faut faire avec. Lors de la conférence de presse organisée par Shockley, en présence de McCabe qui se serait bien passé de cet entracte, l’un des journalistes demande pourquoi le brillant policier qui officiait auparavant à New-York a été muté à Portland. Le genre de question qui fâche. McCabe aurait-il un secret ? La réponse fournie par Shockley semble assez convaincante pour faire taire les curieux. McCabe aperçoit dans la foule une jeune femme qui n’est pas journaliste et profite de la cohue pour s’éclipser. Il la revoit plus tard et elle affirme avoir des révélations à lui faire.  

McCabe s’entretient avec l’entraineur de football de Katie qui est aussi son professeur de biologie. Mais il oriente son enquête vers tous les chirurgiens de l’état susceptible de pouvoir extraire un cœur proprement de son enveloppe. Et en compulsant son ordinateur, il dégotte qu’une affaire similaire s’est produite trois ans environ auparavant en Floride. Il téléphone à l’un des policiers qui était en charge de l’enquête et apprend que Lucas Kane, le fameux ami figurant sur la photo était en Floride aussi mais qu’il est mort, assassiné.  

Les heures défilent et le temps presse car McCabe espère retrouver saine et sauve Lucinda avant que le chirurgien, ou présumé tel s’occupe de son cœur. Et d’autres affaires semblables refont jour. Or à chaque fois ce sont des femmes blondes, jeunes, sportives qui ont disparu sans qu’on les retrouve.  

Démarrant comme un bon roman policier de suspense classique, Donne-moi ton cœur bascule peu à peu dans le frileur (thriller pour les anglophiles). L’angoisse devient de plus en plus oppressante et le lecteur participe à cette course contre la montre tournant fébrilement les pages jusqu’à l’épilogue. Bientôt il possède une petite idée de l’identité du coupable, mais l’auteur, en marionnettiste adroit, a su garder quelques ficelles invisibles dans ses mains, jouant à faire évoluer ses personnages avec dextérité et instillant l’angoisse progressivement. Peu à peu il donne de l’épaisseur justement à ceux-ci, s’attardant sur McCabe, ses antécédents, mais également sur sa vie privée. Le policier est inquiet lorsqu’il laisse Casey, sa fille de treize ans, seule, car sa femme l’a quitté pour plus riche que lui. Les goûts de luxe ont été plus forts que l’amour. D’ailleurs elle se manifeste pour revoir Casey, alors qu’elle n’avait pas donné de signe de vie depuis trois ans. Alors oui, McCabe se demande si c’est pour récupérer Casey ou simplement une tocade. Kyra, sa compagne du moment, effacée dans le récit est toujours présente au bon moment, tandis que Maggie sa coéquipière, il apprend à la connaître et à l’apprécier.

D’autres faits sont également révélés, qu’ils fassent partie du récit ou non, mais qui ne l’alourdissent pas, tout juste un répit dans la progression montante de l’intrigue et de l’angoisse qui la nimbe. 

  Paul (Les lectures de l'oncle Paul)


James HAYMAN : Donne-moi ton cœur (The Cutting – 2009. Traduit par Frédéric Brument). Pré-publié chez France-Loisirs sous le titre L’écorcheur de Portland. Editions de l’Archipel. 12 juin 2013. 418 pages. 22,00€.