24/08/2011
Traquées, de Michael Robotham
Une chronique de Cassiopée.
Il existe un moment …
Si je vous demande de vous mettre nu(e) sur votre balcon, le ferez-vous ? Non, bien sûr…
Si je vous dis que je suis en train de torturer physiquement votre enfant (dont vous entendez les cris) et que pour faire cesser cela, il faut que je vous voie nu(e) sur votre balcon, que ferez-vous ?
Jusqu’où êtes-vous capable d’aller pour sauver la vie de votre fils (fille) ?
Jusqu’où un homme peut-il pénétrer l’esprit d’un autre, le manipuler mentalement ?
Ces questions ont été abordées dans d’autres thrillers mais l’originalité de celui-ci réside dans le fait qu’un professeur de psychologie va se trouver, tout à fait par hasard, mêlé à l’enquête policière. Du fait de son métier, cet homme, que nous découvrirons petit à petit, malade, se posant des questions, inquiet pour son couple, pas forcément prêt ni désireux de s’occuper de tout ça, va essayer de comprendre le « fonctionnement » de l’esprit de l’homme recherché pour le faire arrêter.
Le déroulement en lui-même ne sort pas vraiment de l’ordinaire, mais ce sont bien « les deux voix » de ce roman qui en font sa force. Deux voix qui parfois s’équilibrent, se répondent, se questionnent, s’apostrophent …
Deux voix mais aussi deux esprits, deux âmes qui luttent, s’interrogent, polémiques ….
Première voix :
« Il existe un moment où tout espoir disparaît, où toute fierté, toute attente, toute foi, tout désir cessent d’exister. Ce moment m’appartient. Il est à moi. C’est là que j’’entends le bruit, le bruit d’un esprit qui craque. »
Deuxième voix :
«La puanteur rance de la terreur m’emplit les narines et quelque chose de petit et de sombre trottine à l’intérieur de ma poitrine, se creusant un passage dans les cavités de mon cœur. Je l’entends maintenant …. »
Les passages où le « tueur » s’exprime sont en italiques, les autres sont en caractères classiques, on ne peut donc pas se tromper. Les actes horribles qu’il entre prend sont-ils pour lui le moyen d’exister ?
«Je me réveille parfois la nuit avec l’angoisse d’avoir disparu dans mon sommeil. C’est ce qui arrive quand personne ne tient à vous.
Certains passages, pour qui lit un peu trop de romans policiers, peuvent sembler « cousus de fil blanc » et de temps à autre prévisibles mais cela ne nuit pas au contenu car je le répète, c’est bien l’effet ping pong entre les deux principaux protagonistes qui fait la force de ce livre.
L’écriture est équilibrée, le ton juste, j’emploie, à dessein ; ces deux adjectifs. Jamais l’auteur n’en fait « trop » (même si on peut penser que soixante pages en moins auraient « allégé » le roman sans lui porter préjudice, au contraire…). Jamais il ne sombre dans le pathos, dans de trop longues descriptions et c’est préférable. Il me semble qu’en agissant ainsi, parfois, on « devine » (notre esprit prend le relais) en filigrane de ses écrits ce qu’il veut transmettre. Il nous « manipule » nous aussi mentalement, nous obligeant à « sentir » la peur des personnages, à regarder par-dessus notre épaule, à appeler notre enfant « pour voir si tout va bien » et lui redire « qu’on ne parle pas aux inconnus, même s’ils paraissent tout connaître de nous », comme si tout ce qu’on lisait, qui n’est qu’un roman, n’est-ce pas …. comme si tout cela …. et bien quelquefois, dans la vie réelle aussi …. Il n’y a qu’à regarder dans les journaux …. alors …. trop de précautions ne nuit pas ….
Et revient alors, lancinante, cette question, « qu’aurais-je fait à leur place ? » …
Je la connais, la réponse, mon fils aussi….Il a souvent entendu : « Si un jour, quelqu’un te fait du mal …. » et là on s’aperçoit, terrifié que ….
Vous l’aurez compris, ce thriller psychologique m’a beaucoup plu parce que l’auteur a su creuser au plus profond des deux personnages principaux (et des autres aussi), fouillant leur âme, les obligeant à se mettre à nu (sans jeux de mots), les poussant dans leurs retranchements, détruisant toute velléité de résistance et m’entraînant de pages en pages à vouloir, moi aussi, les comprendre …
Cassiopée
Traquées
de Michael Robotham
Sabine Boulongne (Traduction)
477 pages
Jean-Claude Lattès (7 octobre 2009)
Collection : Suspense & cie
Quatrième de couverture:
Une femme nue en talons rouges se tient sur le parapet du pont suspendu de Clifton, le dos collé à la barrière de sécurité. Elle pleure au téléphone. À quelques mètres d'elle, Joseph O'Loughlin, psychologue, s'efforce de la dissuader de sauter. " Vous ne comprenez pas ", chuchote-t-elle avant de s'élancer dans le vide. Plus tard, Joe reçoit une visite de la fille de la victime, convaincue que sa mère n'aurait jamais attenté à ses jours. Joe voudrait la croire... Thriller psychologique terrifiant, Traquées explore les recoins les plus sombres de l'esprit humain. C'est à ce jour le roman le plus puissant de Michael Robotham.
Quelques mots sur l’auteur :
Avant de devenir écrivain à plein temps, Michael Robotham était journaliste d'investigation. Il vit à Sydney avec sa femme et ses trois filles. Ses précédents romans, Le Suspect, La Disparue et La Clandestine ont également été publiés aux éditions Lattès.
15:17 Publié dans 02. polars anglo-saxons | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook | |
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