16/05/2012
Le septième fils, de Arni Thorarinsson
Une chronique de Pierre
L'Islande était, il y a encore peu, un pays inconnu, sinon oublié. Depuis les sept romans traduits en France d'Arnaldur Indridason, depuis une crise financière insensée (2009), depuis qu'un volcan (au nom imprononçable...) a semé la panique sur la planète entière en mai dernier, l'Islande désormais fait (presque) partie de l'Europe. L'Islande s'éveille, donc, mais avec une gueule de bois, ce qui préoccupe les auteurs de romans noirs.
Einar, journaliste, ex alcoolique, se trouvait déjà exilé à Akureyri, bien loin de Reykjavik. Ses déboires ne sont pourtant pas terminés, et son rédacteur en chef l’envoie enquêter sur la situation économique du port d’Isafjördur, « capitale » des fjords de l’ouest, en pleine de récession depuis que l’industrie de la pêche s’est déplacée. De longues, très longues soirées en perspective …
Sauf qu’Einar semble attirer les ennuis comme le miel attire les mouches ! Dès son arrivée, une vieille maison brûle, le camping car flambant neuf de deux touristes lituaniens est volé, un joueur de foot de l’équipe nationale en virée est porté disparu avec son meilleur pote … Il ne manque plus que la mort suspecte d’un député, valeur montante de la gauche islandaise. Décidément, dès qu’Einar apparaît, les choses s’animent.
On retrouve avec plaisir Einar (déjà rencontré dans Le Temps de la sorcière et Le Dresseur d'insectes), son humour, sa nonchalance, son flegme. Avec lui Arni Thorinsson nous amène à l’extrême nord-ouest de l’Islande, dans une zone touchée de plein fouet par les restrictions sur la pêche. Une région qui, malgré son isolement géographique, subit (ou recherche) comme le reste du pays, la mondialisation : arrivée d’immigrés, ouverture (invasion ?) aux autres cultures, uniformisation de la consommation et des loisirs …
Selon les personnages croisés par le flegmatique journaliste, cette fin de la spécificité islandaise est perçue comme une chance ou une catastrophe. L’intrigue avance à son rythme, mais ce n’est pas pour elle qu’on aime ce roman. Amateurs de thrillers dopés à l’adrénaline, Le septième fils n’est pas pour vous. Si, par contre, vous êtes intéressés par la description d’une région peu connue, si vous voulez ressentir l’hiver islandais, les pieds gelés d’avoir marché entre les congères, si vous voulez vous plonger dans une société en pleine mutation, où les plus jeunes parlent un mélange d’islandais et d’anglais, et où les plus anciens ruminent contre la perte de valeurs et de repères, pour ne pas dire contre la perte d’une certaine islanditude (tant pis pour le barbarisme royal).
Surtout, si vous aimez qu’un auteur aime ses personnages, tous ses personnages, « héros » comme seconds, voire troisième rôle, qu’il accorde à tous son attention, sa tendresse, qu’il leur donne à tous épaisseur et humanité, et qu’il le fasse avec humour, alors ce septième fils est pour vous.
Pierre Mazet ( http://www.pierre-mazet.com/ )
Le septième fils
Arni Thorarinsson
Points policier
445 pages
7,90 €
Présentation de l’éditeur.
Les soirées sont longues à Isafoldur, la capitale des fjords de l'ouest de l'Islande, quand on est chargé de traquer le scoop par un rédacteur en chef avide de sensationnel, et qu'on rêve de retrouver sa nouvelle petite amie laissée à Reykjavik. Et puis on découvre que les bars des hôtels abritent des célébrités intéressantes, une séduisante vedette du football national et son copain d'enfance qui le suit comme son ombre et profite de ses conquêtes, une chanteuse pop qui a failli gagner le titre de Nouvelle Star, un brillant avocat d'affaires, les groupies respectives de ces gens importants, et des groupes d'adolescents en révolte. Des maisons brûlent, des tombes sont profanées, des touristes lituaniens sont volés et soupçonnés de trafic de drogue, tout s'emballe... Einar, le correspondant du Journal du soir, mène l'enquête avec son air désabusé, sa nonchalance et une ironie qui lui permettent d'apprivoiser les témoins et de porter un regard sans préjugés sur les événements.
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