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21/09/2025

Poupée, de Sylvie Callet

Poupée.jpgEn prélude, une femme qui choisit la mort… Qui et pourquoi ?

Puis, quatre saisons, de l’hiver à l’automne suivant pour faire connaissance avec Laurie. Elle a vingt-cinq ans, plus travail, ni de revenus, elle n’a pas d’autres solutions que le retour chez ses parents, même si elle n’en a pas envie… Elle sait qu’elle va étouffer.

Le père, Benoît, fait régner un régime de terreur, il est le mâle alpha, celui qui décide de tout, des vêtements, de la musique qu’on écoute (ou pas) à la maison, des sorties (ou pas) qui sont autorisées. La mère, Ingrid, obéit, même si en cachette, parfois, elle semble, non pas se rebeller (la chape, sur ses épaules est bien trop lourde) mais transgresser, un peu, juste un peu… Laurie observe, se tait, essaie de se faire oublier, tout en espérant une autre vie….

Elle n’aurait sans doute jamais imaginé, ne serait-ce qu’une partie de ce que le destin lui réservait. Elle se retrouve confrontée à une situation qui lui échappe. Elle découvre sa mère sous un autre jour et ne sait qu’en penser. Elle se questionne mais elle-même vit des choses très fortes et elle est un peu perdue.

Dans ce décor méditerranéen où le ciel bleu est souvent là, Sylvie Callet écrit une histoire sombre. On est loin des clichés ensoleillés du midi où tout le monde profite du bon temps.

C’est un récit « habité » par les différents protagonistes. Ils sont « palpables », tout comme les lieux et les scènes présentés. Le lecteur est au cœur de l’intrigue, au plus près de chacun. Leurs émotions nous touchent ou nous hérissent, leurs peurs nous angoissent, leurs interrogations sont les nôtres…

L’écriture de l’auteur est immersive, belle car elle magnifie chaque mot pour en tirer ce qu’il a de meilleur. Le vocabulaire est celui qui correspond le mieux à ce qu’elle veut nous transmettre. Il est à la fois fort,lyrique et porteur de sens car sélectionné avec soin, chaque terme étant à sa juste place.

« Son apparition inattendue contraste de façon dérangeante avec le souvenir brouillé qu’elle s’est construit de lui, un portrait emmiellé par la sépia du temps, imprégné d’un fantasme de conte de fée auquel elle a succombé après seulement quelques jours d’absence, donnant à celle-ci une valeur d’épreuve, Pénélope moderne tricotant le jour des tresses de sagesse et de résignation, détricotant la nuit son ouvrage de patience en sanglots d’abandon – des larmes d’alcool blanc infusé de racines essouchées, d’absinthe à ravaler, de mille écorces amères – suivis d’étreintes désespérées avec son traversin . »

Ce roman aborde plusieurs thèmes, la trahison, la manipulation, l’emprise que certaines personnes ont sur d’autres, le mensonge, les non-dits familiaux, la vengeance…. La tension s’installe assez vite et monte en puissance au fil des pages, on ne souffle pas ou si peu…

Ce qui est très fort, c’est d’associer ce style incisif, marquant, parlant de noirceur, avec une certaine forme de poésie et de belles métaphores.

« Et de planter dans les siens des yeux d’une noirceur abyssale, deux sabres d’obsidienne dégouttant d’une encre luisante, épaisse comme une coulée de lave. »

Je ne savais pas à qui faire confiance, que croire. Les individus de cet opus ne sont pas « lisses », ils ont tous une face cachée, ils ne se dévoilent jamais en entier ou alors ils nous bernent. C’est toute la complexité de l’âme humaine, de ceux qui portent, parfois, un passé si lourd, qu’ils ont besoin de l’éliminer de n’importe quelle façon, parce qu’ils doivent « se libérer ». Les relations humaines ne sont pas simples et parfois le dialogue est très compliqué car certains jugent vite, trop vite et agissent sans mesurer les dégâts collatéraux.

J’ai énormément apprécié ce recueil, ces protagonistes cabossés par la vie, tellement « vivants » que je ne les oublierai pas.

Éditions  du Caïman (26 Novembre 2024)
ISBN : 978-2493739209
250 pages

Quatrième de couverture

Un soir d’hiver, sur la côte méditerranéenne, une femme surnommée Poupée se jette à la mer. Non loin de là... À vingt-cinq ans passés, Laurie, privée de revenus, est contrainte de revenir vivre chez ses parents, dans un petit village côtier du Var, à proximité de Toulon. Père manipulateur, mère sous emprise... La jeune femme a bien du mal à se réadapter à cet environnement toxique.

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