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14/03/2012

Adieu, de Jacques Expert (chronique 3)

adieu.jpgUne chronique de Richard


Avec «Adieu» de Jacques Expert, je poursuis mon exploration des auteurs de polars qui écrivent en français. Et j’avoue que je trouve relativement plaisant ces rencontres avec des auteurs qui me sont inconnus et qui arrivent à m’intéresser à leur histoire.
«Adieu» est un polar assez atypique. Comme dans tout roman policier, il y a un meurtre et l’enquête est menée par un inspecteur qui tente de découvrir la vérité. Et là s’arrête toute comparaison avec les autres romans. L’important dans ce roman de Jacques Expert se révèle ailleurs, tout au fond du cerveau du policier enquêteur, jusqu’à l’obsession maladive dans sa recherche de LA vérité. Voyons donc où tout commence !
 

En 2001, dans une petite commune du sud-ouest de Paris, les policiers retrouvent les corps d’une mère et de ses deux enfants. Le père lui, est porté disparu. Une famille sans histoire, un drame épouvantable ! Évidemment, tous les soupçons se dirigent vers le père. L’enquête est confiée au commissaire Langelier.
 

Un mois plus tard, à la même date, dans la nuit du 19 au 20, une deuxième famille est décimée. Même mode opératoire, même violence contre la femme et les enfants. Tous s’entendent pour dire qu’un tueur en série est l’auteur de ces deux carnages. Sauf le commissaire Langelier qui croit qu’un des deux pères est le meurtrier. Contre la presse et toute sa hiérarchie, il soutiendra cette thèse du père meurtrier. Même son grand ami et supérieur, le commissaire Ferracci perd confiance et lui retire l’enquête.
 

Commence alors, une lente mais inexorable descente aux enfers. L’enquête se transforme en une obsession maladive qui lui fera perdre sa famille et l’isolera de toute relation professionnelle. À tous les jours, il pensera à cette enquête, il continuera ses recherches, il analysera les informations et surveillera tous les acteurs ayant, peut-être, joué un rôle dans ces deux carnages. Son patron et ami Ferracci deviendra son pire ennemi et ils s’affronteront dans un combat sans merci, pour que la vérité, leur vérité propre soit révélée au grand jour.
Et le soir de sa mise à la retraite, dix ans plus tard, le commissaire Langelier, en présence de son ennemi et de quelques collègues avec qui il a travaillé, racontera avec moult détails, tous les moments de cette enquête. Et voilà le tour de force de l’auteur qui pendant plus de 220 pages, donne la parole à son personnage principal dans un discours étonnant, pour lui permettre de raconter ce qu’il a vécu au cours des dix dernières années.
 

Roman policier mais surtout roman psychologique, «Adieu» décrit cette longue glissade vers un abîme certain, une conclusion attendue mais qui nous surprend quand même. Même si tout au long du roman, on imagine la conclusion, on y arrive essoufflé, le coeur battant la chamade, envahi par la pitié et l’incompréhension, en se demandant comment quelqu’un peut se rendre là, comment quelqu’un peut se perdre dans sa «mission impossible» ! J’admets que si on m’avait dit que les deux tiers du roman était un «long discours d’adieu», je ne l’aurais probablement pas lu.
 

Je me suis laissé porter par l’histoire et le rythme qui s’accélère. Puis, tout à coup, on tourne les pages en tentant de voir si nos soupçons, nos hypothèses se vérifient; on accompagne Langelier dans sa folie et on la partage, un peu. Et la fin nous soulage de cette tension, de cette folie qui accable le commissaire.
 

J’ai aimé cette première lecture, malgré quelques longueurs et un style vaguement absent. Ce premier roman lu de Jacques Expert me laisse un peu sur ma faim; un discours de 200 pages, ça reste quand même long. J’espère que certains d’entre vous pourront me dire si ses autres romans valent le détour. J’attends donc vos commentaires ... que je lirai avec plaisir.
 

Un paragraphe, juste quelques mots qui résument bien ce personnage et sa folie. Est-il crédible ? Y croit-on ? Comment pouvons-nous croire à cette folie ? Devant cette réalité, tout humain serait porté à croire que c’est impossible. Comment peut-on aller si loin, comment peut-on tomber si bas ?
 

«Dans le regard de ces hommes qui ont croisé ma vie, je lis de l’étonnement, je devine quelques doutes, parfois un soupçon de pitié. Peut-être se demandent-ils si mon obstination n’a pas viré à l’obsession. Pensent-ils que je suis devenu fou, que je me suis laissé dévorer ? Que je ne suis plus moi-même ?
"J’ai envie de les rassurer et de leur dire: «J’ai toute ma tête, messieurs.»

Je préfère me taire."

Alors, y croirez-vous ?
Bonne lecture !

Richard, Polar Noir et blanc

Nous avons également publié deux autres chroniques sur ce roman :

- celle de Paco

- Celle de Christophe

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