23/10/2012
Le cortège de la mort, de Elizabeth George (chronique 2)
Une chronique de Paul.
Prenez un tableau de Bruegel l’ancien (n’importe lequel, c’est juste pour une comparaison), enfin quand j’écris un tableau, choisissez plutôt une reproduction, cela vous coutera moins cher, et découpez-le en toutes petites pièces, façon puzzle. Et essayez de le reconstituer, sachant que vous n’avez plus de modèle sous les yeux pour vous fournir la moindre indication. Pas facile, n’est-ce pas ? Ce roman d’Elizabeth George est construit un peu de cette manière, l’auteure commençant par assembler quelques personnages, à évoquer une scène, les abandonnant pour aller ailleurs et amorcer un autre décor peuplé d’individus qui en apparence n’ont aucun lien avec les premiers, et ainsi de suite jusqu’à ce que le tout commence à avoir un début de cohérence. Et pour compléter l’ensemble un fil rouge, lequel, si on tire dessus, assemble toutes les pièces.
Puisque je viens de l’évoquer, débutons pas ce fameux fil rouge. Trois gamins de dix et onze ans, perturbés dans leur vie familiale pour diverses raisons, décident ce matin là de ne pas aller à l’école, et de trainailler selon leur inspiration, détruisant sur leur passage ce qui leur tombe sous la main, volant de menus objets, bref s’amusant comme de petits délinquants en herbe. Sauf que l’herbe est déjà haute.
Dans la forêt de Hampshire, Meredith, fâchée depuis plusieurs mois avec celle qui fut sa grande amie, Jemima, décide de confectionner pour son anniversaire un gâteau et de le lui apporter, geste qui pourrait sceller leur réconciliation. Lorsqu’elle arrive devant le petit commerce dans lequel Jemima vend ses cupcake, la boutique est fermée et semble abandonnée. Par Gina Dickens, aucun lien de parenté avec le célèbre auteur, la nouvelle petite amie de Gordon Jessie, elle apprend que la jeune femme a tout plaqué un beau jour et depuis n’a plus donné signe de vie. Gordon et Jemima vivaient ensemble mais il s’est passé quelque chose qui a tout déréglé. Gordon, chaumier de son état, vit avec Gina depuis un mois et leur rencontre est décrite dans le chapitre précédent et sur lequel je ne reviendrai pas pour faire court. Rob Hastings, le frère de Jemima est inquiet car il n’a plus d’appels de sa sœur qui lui téléphonait assez souvent de Londres, et lui avait confié qu’elle avait trouvé l’homme de sa vie. Une fois de plus.
A Londres, une nouvelle commissaire intérimaire, Isabelle Ardery, est nommée à New Scotland Yard, mais elle n’est pas trop rassurée dans l’exercice de ses nouvelles fonctions. Elle puise donc son cran dans de petites fioles de vodka qu’elle ingurgite dans les toilettes, se rafraichissant l’haleine après, afin de tromper son monde et ne pas montrer à ses nouveaux équipiers, supérieurs hiérarchiques et subordonnés qu’elle est sous dépendance. Et pour établir son autorité elle demande à Barbara Heavers, qui longtemps travailla avec l’inspecteur Linley, de modifier son apparence vestimentaire. Ce qui relèverait de l’exploit de la part de la jeune policière qui n’en a cure mais pourtant essaie d’obéir aux ordres.
Le cadavre d’une jeune femme est retrouvé dans le cimetière d’Abney Court, la gorge tranchée. Il faut d’abord définir son identité, et entamer une enquête qui risque d’être longue afin de retrouver son assassin. Alors Isabelle Ardery demande à Thomas Linley de l’aider et l’inspecteur, bonne pâte, accepte. De plus ce travail, le retour dans l’ancienne équipe avec laquelle il s’entendait bien, va peut-être permettre à Linley de s’occuper l’esprit et ne plus penser, tout du moins avec moins de tristesse, à sa femme décédée quelques mois auparavant.
Le puzzle commence à prendre forme, à vous de le terminer maintenant.
Ce roman d’Elizabeth George va ravir les inconditionnels de celle qui est surnommée la Reine Elizabeth malgré sa nationalité américaine, mais si j’avais bien aimé ses premiers ouvrages, la longueur de cette histoire me laisse perplexe. A mon humble avis, ce roman aurait gagné en puissance si la trame n’avait pas été autant délayée.
Elizabeth George s’amuse avec ses personnages et par exemple le cours de relookage (en français dans le texte) infligé par la jeune Hadiyyah à Barbara Heavers, n’était pas indispensable et aurait pu servir de sujet à un magazine de mode, ou avec une extension de l’histoire à une Harlequinade. Je sais que quelques uns d’entre vous vont me considérer comme grognon, ronchon, mais j’eus préféré que ce pavé pèse moins lourd afin de pouvoir mieux le digérer. Toutefois j’admets que 1024 pages pour 9,80€, soit un peu plus de 1 centime la page, au moins le client en a pour son argent. Bon assez ironisé, c’est un bon roman auquel je reproche tout simplement d’être un peu longuet, et j’attends de Reine Elizabeth qu’elle nous concocte d’autres histoires aussi subtiles mais en plus raccourcies.
Paul (Les lectures de l'oncle Paul)
Le cortège de la mort (This body of death – 2010).
Elizabeth GEORGE
Traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Anouk Neuhoff. (Réédition de Collection Sang d’Encre, Presses de la Cité – octobre 2010).
Editions Pocket.
1024 pages. 9,80€.
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