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24/04/2013

La soeur de l'ombre, de Patricia MacDonald

soeur_de_l_ombre.jpgUne chronique de Jacques.

Quand la « reine du suspense » se plante en beauté !

 Comme souvent chez Patricia MacDonald, l’enquête va être menée par une jeune femme qui part à la découverte de la Vérité et, ce faisant, va sauver sa Famille.

Car la Famille, chez cet auteur, est bien une obsession récurrente, quasi obsessionnelle, qui occupe la place centrale de son univers au détriment des rapports sociaux, politiques, financiers ou simplement humains qui ne sont la plupart du temps que vaguement esquissés, de façon parfois caricaturale. Et si nous voyons l’héroïne de cette histoire, entrer à la fin de ses études dans le monde du travail, celui-ci ressemble à un gentil conte de fées, uniquement destiné à mettre en relief les nombreuses qualités de la jeune femme. Loin des dures réalités de notre temps.

Cela dit, il n’est pas interdit d’aimer les contes de fées ! À chacun de voir...

 L’intrigue imaginée par l’auteur, sans être d’une grande complexité, est bien ficelée et pourrait tenir la route. On trouve beaucoup de bons romans, y compris de suspense, qui n’ont pas une intrigue meilleure que celle-ci. Pourquoi, dans ces conditions, ce livre m’a-t-il laissé un tel sentiment de ratage, d’insatisfaction, de déception ?

 La première raison est liée à son écriture.

Alors que certains bons romans sont difficilement adaptables au cinéma en raison même de la qualité de leur écriture, souvent intransmissibles par l’image, c’est l’inverse pour Patricia MacDonald. Son écriture est terne, d’une grande platitude et les dialogues sans grand relief, mais ses intrigues sont suffisamment astucieuses pour offrir au cinéma où à la télévision un scénario solide, pouvant servir de support à de bons téléfilms. Ainsi, L’étrangère (adapté de son roman l’expiation), ou Mort prématurée, sans être des chefs d’œuvre, sont plaisants à regarder, bien faits, bien construits.

 Le fait que les dialogues occupent plus de la moitié du livre est d’ailleurs une indication sur le souci qu’a l’auteur de tirer son histoire en direction des scénarios de films, et permet de comprendre le peu d’épaisseur de ses personnages, y compris des personnages principaux.

 La deuxième raison porte sur le manque de crédibilité du personnage d’Alex.

Voici une jeune femme qui va voir en prison une inconnue, accusée d'un meurtre horrible. Celle-ci se montre avec elle désagréable, violente, égoïste.

N’importe qui, dans la vie réelle, la laisserait moisir en prison, d’autant plus qu’elle a été jugée, reconnue coupable, et que tout l’accuse. Mais pas Alex ! Parce qu’elles ont une « proximité génétique », notre héroïne va s’occuper d’elle, la défendre, la comprendre, la soutenir, chercher à se faire aimer d’elle. Elle ira même jusqu’à prendre pour elle des risques qui pourraient s’avérer mortels.

 Le lecteur que je suis est resté abasourdi devant un tel comportement, qui dépasse les limites de l’absurdité.

Naturellement, un roman est un roman et l’auteur a le droit de tout imaginer, y compris un personnage ayant un comportement absurde. Mais pour que son histoire fonctionne, il faut l’auteur réussisse à donner à ce personnage-là un minimum de crédibilité.

 Or à aucun moment le personnage d’Alex n’est crédible, Patricia MacDonald n’a pas réussi à nous faire sentir ce qui la motive à risquer ainsi sa vie pour cette inconnue antipathique, ses ressorts psychologiques ne sont pas travaillés de façon suffisamment pertinente pour nous faire vivre « de l’intérieur » sa démarche et ses choix.

 Alex est pourvue de qualités multiples : obstinée, intelligente, talentueuse, sympathique, aimable, généreuse... et j’en oublie, certainement. C’est bien, je suis heureux qu’elle possède toutes ces qualités. Mais elles ne suffisent pas à en faire autre chose qu’un personnage de papier, inconsistant, sans épaisseur, sans vie, sans une once de chair.

 Dommage...

 Il reste l’intrigue, qui sauve le livre du désastre total. Peut-être permettra-t-elle de tirer du livre un film ou un téléfilm potable, si le réalisateur arrive à gommer les défauts du roman ?

 C’est ce que je peux souhaiter de mieux à Patricia MacDonald, qui pour le coup, s’est bel et bien plantée en beauté.

  Jacques, lectures et chroniques

 

La sœur de l’ombre
Patricia MacDonald
Editions Albin-Michel (27 mars 2013)
352 pages; 20,90 €

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