Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

01/05/2014

Joyland, de Stephen King

joyland.jpgUne chronique de Jacques.

Stephen King réussit avec Joyland un beau roman d’apprentissage.

 Avec son Joyland, Stephen King nous propose une histoire qui, si elle frôle le fantastique et effleure le polar, est avant tout un beau roman d’apprentissage, émouvant et tendre.

Car c’est bien l’apprentissage de la vie qui va être au cœur de cet été et de l’automne 1973 pour Devin Jones, « puceau de vingt et un ans rêvant de devenir écrivain » : il va, pendant cette courte période, avoir le cœur brisé par Wendy, son premier amour d’adolescence, découvrir des amitiés vraies, du genre de celles qui durent toute la vie, mais aussi l’éblouissement de sa première expérience sexuelle, ainsi que la tendresse et la compassion pour un jeune garçon atteint d’une maladie incurable et qui va bientôt mourir...

Tout cela arrive parce que Devin a accepté, pour payer ses études à l’université, de vendre du bonheur, comme le lui explique le charismatique nonagénaire propriétaire du parc d’attractions, Joyland, situé en Caroline du Nord. Ce bonheur, Joyland va l’apporter à Devin dans le même temps qu’il va lui-même en apporter aux enfants, qui viennent y  faire une provision de souvenirs à conserver jusque dans les derniers instants de la vie.  

Devin Jones est le narrateur de son histoire. Il nous la raconte quarante ans après l’avoir vécue et, dans les 350 pages du roman, il va nous montrer comment cette expérience de vie l’a marqué à jamais. Stephen King oblige, le suspense est aussi présent sous la forme d’une histoire policière qui va trouver sa conclusion dans les dernières pages du livre avec quelques passages d’une grande intensité dramatique. Une jeune fille a été assassinée à Joyland quelques années plus tôt, sans doute par l’homme qui l’accompagnait et qui a disparu sans jamais être retrouvé. Une histoire qui aurait été oubliée si une légende ne courait pas parmi les employés du parc sur le fantôme de cette jeune fille, qui aurait été vu par certaines personnes à l’endroit du parc d’attractions où elle a été tuée : la Maison de l’Horreur. Devin va donc s’intéresser à l’histoire et enquêter, chercher à savoir si ce meurtre est isolé ou s’il est l’œuvre d’un tueur en série.  

Mais si l’enquête est un élément important de l’histoire, elle n’en est pas l’élément central, car  Stephen King préfère s’attacher à la description précise de la vie quotidienne et des sentiments du jeune homme. Les rapports de celui-ci avec les personnages qui l’entourent – collègues de travail, amis, logeuse – qui sont toujours au centre de la narration, lui permettent de mettre en évidence avec habileté son évolution, sa transformation, sa mue.

Tout comme il était parvenu à susciter l’émotion et parfois les larmes chez certains lecteurs avec le personnage de Jake Epping de 22/11/63, dans l’extraordinaire passage de la pièce de théâtre montée par celui-ci, Stephen King tente la même expérience avec sa description de Devin Jones jouant le rôle du chien Howie devant les enfants, et si le résultat n’est pas tout à fait aussi émouvant que dans 22/11/63, il réussit tout de même un joli tour de force, là aussi. Un moment de lecture que de nombreux lecteurs n’oublieront pas !

C’est d’ailleurs une caractéristique de ses derniers romans, dans lesquels on le sent suffisamment maître de son talent pour avoir envie de raconter des scènes simples de la vie quotidienne en les rendant palpitantes, même si elles ne comportent aucun élément de suspense. Au fond, peu importe le sujet, l’écrivain doit être capable de faire naître chez le lecteur les émotions qu’il décide de créer en utilisant tous les moyens de l’écriture et de la narration. De ce point de vue, la quatrième de couverture de ce roman, qui nous parle de « terreur », est trompeuse pour le lecteur non averti. Stephen King est tout à fait apte à susciter la terreur chez le lecteur s’il le décide, mais ce n’est plus son problème. Il se sait maintenant capable de jouer sur toute la palette des émotions humaines, ce qui est autrement plus intéressant pour un écrivain que de se centrer sur seulement deux d’entre elles : l’angoisse et la terreur.

Avec ce roman, l’auteur a créé un personnage ouvert et positif face à toutes les expériences nouvelles qui vont le changer. Un peu comme s’il avait voulu dire à ceux qui vont démarrer leur vie d’adulte : regardez ce que la vie peut vous apporter de magnifique si vous l’accueillez avec simplicité et bonne humeur.

Joyland est bien un véritable roman d’apprentissage !

___________________________

Joyland Stephen King Editions Albin-Michel ( 30 avril 2014) 350 pages; 21,90 €

 

Les commentaires sont fermés.