Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

03/07/2014

Reflex, de Maud Mayeras

reflex.jpgUne chronique de Richard.

Certains livres vous marquent plus que d’autres ! On referme la dernière page, on prend quelques secondes pour souffler, réfléchir et on se demande si on a aimé ou non, et jusqu’à quel point on recommande la lecture que l’on vient de terminer.

Généralement, c’est de cette façon que votre dévoué blogueur se comporte à la fin de sa lecture !

Cependant, après avoir terminé la lecture de « Reflex » de Maud Mayeras, jamais je ne me suis demandé si j’avais aimé ou pas. Non ! Tout ce qui émergeait, c’était les émotions vécues, l’empathie envers les personnages et la boule de sentiments qui bloquait impérativement ma respiration. Ce roman n’est pas truffé de sang et de violence ; ce roman s’adresse au lecteur par le biais de son cœur et de sa compréhension de la misère humaine qui se transmet de génération en génération comme un héritage de douloureux malheurs. Ce roman n’est pas un roman policier, il est un formidable thriller psychologique, du genre de ceux qui vous clouent sur votre chaise de lecture et qui vous serrent le cœur dans un étau de fièvre et d’émotions.

Iris Baudry est une photographe judiciaire, appelée à toute heure du jour et de la nuit sur les scènes de crimes les plus atroces. Un appel la ramène sur les lieux de son enfance, à l’endroit même où il y a quelques années, son fils a été assassiné. Troublée, elle revoit sa mère qui a pourri son enfance, habite temporairement la maison où elle a vécu et se rend compte que les circonstances du meurtre du jeune garçon ressemblent à celles de son fils.

Tous ces éléments déclenchent un pénible retour en arrière, une succession d’images où le père trop vite parti, la mère, croque-mitaine despotique et la perte tragique de son fils hantent les jours et les nuits de la photographe. Les murs de la maison familiale deviennent l’écran où le film de son enfance se déroule comme une succession de violences physique et morale.

Quelque part en septembre 1919, Julie Carville vit une enfance normale. Heureuse. Elle fêtera bientôt ses 13 ans ! Tout bascule quand elle rencontre sur sa route, trois soldats qui l’agressent et la violent sauvagement ! Enceinte, elle se fait jeter à la porte de la maison par son père parce qu’elle a entaché l’honneur de la famille. Ostracisée par sa famille et répudiée par les gens du village qui la traitent de trainée, elle se retrouve quelques mois plus tard, dans un pensionnat pour jeunes filles où la tendresse, la compréhension, la douceur et le pardon ne faisaient pas partie des qualités exigées aux religieuses qui y œuvraient.

Lucie y est née et sa descendance viendra assurément rejoindre l’histoire des meurtres des jeunes garçons.

« Reflex » est un roman passionnant ! En plus, il est superbement bien écrit ! Maud Mayeras semble posséder une plume qui glisse sur le papier avec une douceur toute en contradiction avec le ton et la noirceur de son roman. En plus, elle a commencé une grande partie des quelques 58 chapitres du roman par une phrase qui revient, d’une façon lancinante, comme un mantra obsédant : « Je n’aime pas … »

J’ai trouvé cette idée géniale … pour son pouvoir d’évocation et sa capacité à situer un personnage envoûtant ! Et au fur et à mesure, ces incipits de chapitre se transforment en un clin d’œil triste et désolant, entre l’auteur et le lecteur. En prime, ces premières phrases nous donnent de beaux moments de poésie, une écriture qui souvent nous charme par sa beauté et son pouvoir d’envoûtement

Inutile de vous dire que je vous conseille grandement ce roman, complexe et haletant qui vous transporte vers une finale pleine de rebondissements. Et ce, malgré une petite erreur (une grossesse qui dure 11 mois !) que le travail d’édition aurait dû corriger ! Mais les grandes qualités du roman et de son auteure compensent grandement cette coquille.

Quoi de mieux pour vous illustrer le style et le ton de Maud Mayeras dans ce roman, que de terminer cette chronique en citant le premier paragraphe du dernier chapitre :

« Je n’aime pas les adieux. Ils ne me font rien. Ni bien, ni mal. Que dalle. Les adieux sont une foutue perte de temps. »

Et voici quelques autres extraits, avant de vous souhaiter une bonne lecture !

« La mort donne dans le détail, elle ne cherche pas à faire beau, elle fige l’homme dans toute sa plus ridicule simplicité. »

« Je n’aime pas les lueurs vives du matin, celles qui rendent vos peurs moins visibles. Elles les planquent jusqu’à la nuit tombée, où elles vous abandonnent avec délectation à vos terreurs délaissées. »

« Il faut que je la voie. Je veux contempler sa déchéance, la regarder danser au milieu des fous, rire en la regardant crever à petit feu. Peut-être alors serai-je enfin soulagée. »

Bonne lecture !

Richard, Polar Noir et blanc

 

Reflex
Maud Mayeras
Éditions Anne Carrière
2013; 364 pages

 

Les commentaires sont fermés.