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19/08/2015

Les Assassins, de R.J. Ellory (chronique 2)

les assassins,rj ellory,commémorateurUne chronique de Jacques

 Le côté obscur de l’âme humaine

En s’attaquant à un thème usé jusqu’à la corde –celui des tueurs en série– et en réussissant à le transcender  pour en tirer ce roman puissant et magistral, R.J. Ellory nous confirme une nouvelle fois l’étendue de son talent.

Un  thème usé, certes, mais… attention ! L’auteur ne se contente pas de nous montrer les tristes exploits d’un assassin machiavélique, intelligent et manipulateur, il nous entraine en prime – après avoir réuni une impressionnante documentation –   dans l’univers des  tueurs en série les plus déjantés et les plus tarés qui ont réellement sévi aux Etats-Unis,  depuis Ted Bundy jusqu’à John Wayne Gacy, en passant par le célèbre Zodiaque.

Et ce n’est pas seulement dans leur univers que nous sommes projetés, c’est également dans celui de leurs admirateurs, ceux qui sont fascinés par la capacité de certains d’aller au-delà de toutes les limites sociales  et qui peuvent assouvir cette fascination collectionnant des objets ayant appartenu aux tueurs les plus célèbres.

 Naturellement, cette plongée dans les eaux profondes de l’âme humaine – tout comme dans l’hyper violence d’une frange de la société américaine – ne tombe pas du ciel ; elle est soigneusement préparée par l’intrigue  concoctée par l’auteur, une intrigue qui justifie cette description détaillée – mais non complaisante – des crimes et de la personnalité des tueurs.

 En effet, Ray Irving, le flic new yorkais qui dirige l’enquête, est confronté à un tueur qui semble fasciné par ses célèbres devanciers, puisqu’il choisit ses victimes en utilisant les dates anniversaires et les modes opératoires de certains de leurs crimes. Il s’agit pour cet assassin de commémorer à sa façon ce que la société américaine a produit de plus horrible, et cet objectif  va lui permettre de se voir attribuer le surnom – attribut journalistique indispensable à tout tueur en série qui se respecte –  de  Commémorateur.

 Comme d’habitude, Ellory a apporté un soin méticuleux à la description de ses personnages. Trois d’entre eux dominent le récit.  Ray Irving est le personnage central, un flic solitaire obsédé par son travail.  Ses relations avec Karen Langley, une journaliste du City Herald contactée par le Commémorateur sont à géométrie variable, allant du pire au meilleur et réciproquement. Mais c’est John Costello, qui travaille avec Karen Langley comme enquêteur au City Herald, qui va se révéler le plus intrigant et le plus original de tous les personnages du roman.

A l’âge de dix-sept ans, Costello a miraculeusement réchappé au célèbre tueur au marteau. Nadia, la fille qu’il aimait, n’a pas eu la même chance. Le souvenir de ce drame, qui a marqué Costello de façon indélébile, le pousse à se renseigner sur tous les tueurs en série qui ont sévi aux États-Unis. Sa mémoire prodigieuse lui permet de se souvenir des moindres détails des dates et des scènes de crimes perpétrés par chacun des tueurs. Il est la mémoire vivante de tous ces drames, et puisque chaque nouveau crime commis par le Commémorateur fait référence à un crime plus ancien, c’est à ce titre qu’il va aider  Irving dans son enquête. 

Fragilisé par ce drame,  aussi solitaire que Ray Irving, Costello est pour ce dernier une énigme, puisque son exceptionnelle connaissance des crimes peut sembler obsessionnelle et le rendre suspect. Karen Langley, qui est une amie de Costello, supporte mal cette suspicion, et les rapports entre les trois personnages (Irving, Costello, Langley) sont un des enjeux de l’intrigue, au moins aussi importants que l’enquête elle-même.

 L’enquête, justement : tout comme Michael Connelly, Ellory a un sens aigu du détail qui fait vrai, ce qui donne à celle-ci sa crédibilité et accroit la vraisemblance du récit.   Ray Irving patauge pendant de longs chapitres, et le lecteur avec lui, mais il ne lâche rien et son obstination finira par être payante.

La fin du roman, qui mêle suspense et coup de théâtre est particulièrement réussie.  Après la folie meurtrière dans laquelle ils étaient plongés  et dont on devine qu’elle va perturber durablement leur vie, les personnages peuvent souffler, tenter de vivre une vie presque normale.

 Les admirateurs de R.J. Ellory ne seront pas déçus.  Avec Les Assassins, il reste à son meilleur niveau, celui des quelques auteurs de polars anglo-saxons qui sont incontournables pour les amateurs. Un maître écrivain…

A lire : la chronique de Cassiopée sur ce roman.

Jacques ( blog : lectures et chroniques)

 Les Assassins
R.J. Ellory
Sonatine éditions (août 2015)
528 pages

 

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