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23/02/2020

Les abattus, de Noëlle Renaude

abattus.jpgUne chronique de Cassiopée

Les vivants (1960-1983), les morts (1982-1983), les fantômes (2018), voici les trois parties qui constituent ce roman. La plus grande sera la première, la plus petite, la dernière. J’ai été totalement conquise par ce livre. Le phrasé, l’approche des situations m’ont beaucoup plu. La forme est singulière avec beaucoup de dialogues en style indirect. Cela donne plus de recul sur ce qui est présenté, expliqué. Le lecteur assiste, impuissant, aux différents événements et cette façon d’écrire va très bien avec le contenu.

Dès le début, c’est un jeune garçon qui prend la parole, qui raconte sa vie, dans son foyer avec toutes les difficultés dues au manque d’argent, aux problèmes rencontrés tels le chômage, la maladie, la violence familiale…. Rien ne lui est épargné. Sa vie n’est pas aisée, il essaie d’avoir des amis mais quand on vit dans un milieu « pauvre », on ne peut pas fréquenter n’importe qui… Le plus dur pour lui, c’est que parfois, il ne peut pas choisir, c’est la vie qui le fait pour lui, des rencontres qui s’imposent, envahissant de temps à autre son quotidien, l’emmenant là où il ne serait pas forcément allé…. Il y a en toile de fond, sa vie, faite un peu de bric et de broc, sa survie quand il n’a plus rien à quoi se raccrocher… et en filigrane, des actes violents qu’on ne connaît pas dans le détail, qui ne sont pas décrits, mais qu’on sent, là, sous-jacents. C’est très bien intégré au récit, ça en fait partie mais presque « en douceur »…. C’est une narration subtile, avec une approche poétique quelques fois. « Le ciel délavé par la chaleur est juste une plaque de fonte. »

J’ai été totalement conquise par l’écriture de Noëlle Renaude, elle a une force particulière, que je peine à expliquer. On dirait que beaucoup de choses sont « contenues » mais prêtes à exploser. Et ça se sent dans les phrases, dans les mots. Ils sont posés, puissants, porteurs de sens, entraînant le lecteur dans cet univers en demi-teinte où tout n’est peut-être qu’apparence … Cela crée une atmosphère étrange, où tout peut changer d’un moment à l’autre, tant la banalité de la mort fait partie de la vie…..et peut bouleverser, ou pas, la linéarité des jours …..

J’ai beaucoup apprécié la personnalité des différents protagonistes. Tous ont une part d’ombre, des tourments cachés, une particularité délicate à partager …. Le jeune homme et le flic sont les plus captivants, par ce qu’on apprend d’eux petit à petit, au fil des pages, découvrant ce qui a été tu. La construction en trois parties est également intéressante, les unes et les autres se complétant, s’éclairant jusqu’aux révélations finales.

Je ne connaissais pas les écrits de Noëlle Renaude, j’ai découvert qu’elle avait publié des pièces et que « Les abattus » était son premier roman. Il est vraiment abouti, réussi, surprenant, abordable tout en restant dans un registre d’expression qui flirte avec le théâtre tant les scènes décrites sont « palpables » en peu de mots. Pour moi, c’est non seulement une magnifique découverte mais également un recueil que je n’oublierai pas de sitôt tant les personnages et le fond et la forme m’ont marquée.

 

Éditions :  Payot & Rivages (12 Février 2020)
415 pages

Quatrième de couverture

Un jeune homme sans qualité relate ses années d’apprentissage entre 1960 et 1984 dans une petite ville de province, au sein d’une famille pauvre et dysfonctionnelle. Marqué par la poisse, indifférent au monde qui l’entoure, il se retrouve au centre d’événements morbides.