16/01/2020
Chien de guerre, de Jérémy Bouquin
Une chronique de Cassiopée
Chien de guerre …. Chienne de vie ?
Comme le montre la photo de la couverture «il » a connu la guerre. Pas celle des anciens, non, lui c’est celle de maintenant, en Afghanistan. Il est revenu parfois, en permission, et avec sa copine, ils ont eu un petit. Il ne le connaît pas vraiment ce môme mais c’est le sien alors….
L’armée ça vous forge un homme à ce qu’on dit, oui… mais parfois ça les détruit et ça on l’oublie. Pas forcément une destruction physique, et du coup, c’est bien pire. C’est comme un mal inexplicable qui ronge de l’intérieur, qui transforme celui que vous êtes en bête ou en autre chose… Et lorsque vous revenez de « là-bas » personne ne vous reconnaît et vous, vous ne reconnaissez personne. Engagez-vous qu’ils disaient ? L’armée est une grande famille…. Oui mais….
Franck est revenu au pays, avec son barda de soldat sur l’épaule, le revoilà en France. Pas vraiment comme un héros, mais plutôt perdu, paumé. Comme les fins de mois sont difficiles, sa compagne vit chez sa mère à lui avec le bébé. Dès le début de ce récit, on voit qu’il a du mal à trouver sa place, que le traumatisme de ce qu’il a vu, vécu, le hante. Il n’a pas été accompagné dans ce retour à une vie dans la norme loin des combats, du bruit des bombes et des pistolets mitrailleurs…. L’effet de l’adrénaline est retombé, l’activité à outrance aussi. Comment se reconstruire ? Franck tourne en rond et va finir par faire une rencontre, une vieille connaissance…. Va-t-il s’en sortir ou tomber plus bas ?
Ce récit brut, noir, cerne les limites de la désespérance. L’auteur pointe du doigt le mal-être de Franck, les difficultés à se réintégrer dans son couple, dans sa famille où il n’a plus de repères. Quant à un boulot, n’en parlons pas …. Tout semble lourd à cet homme. Il a l’impression que plus rien ne lui appartient. Son quotidien était tellement différent, comment exister, se positionner ?
J’ai trouvé ce roman très fort, dur, mais réaliste. Bien sûr, toutes les situations ne se ressemblent pas mais on oublie de temps à autre Le SPT (stress post-traumatique) même si on en parle plus qu’avant. Jérémy Bouquin montre bien que c’est une souffrance pour la personne concernée mais également pour toutes celles qu’elle côtoie. Une pathologie de la mémoire qui entraîne d’importants troubles relationnels. Et c’est tellement difficile d’en parler, de le reconnaître …. Franck est hanté par son passé de militaire qui lui revient par flashs et il sait bien qu’il doit trouver une activité professionnelle ….alors quand on lui propose de l’argent gagné facilement, c’est tellement plus simple que de se battre contre les lenteurs administratives….
L’écriture et le style de l’auteur sont francs, très parlants avec des dialogues et des pensées qui font mouche. Jérémy Bouquin va au fond d’un quotidien sombre, délicat à gérer, angoissant, sans tomber dans l’excès. Son propos est parfaitement dosé et ce recueil est un très bon roman noir.
Éditions : du Caïman (14 Janvier 2020)
234 pages
Quatrième de couverture
De retour d'Afghanistan, viré de l'armée, Franck se retrouve chez sa mère avec sa copine et son fils nouveau-né. Cet ancien bidasse va devoir réapprendre à vivre parmi les siens, dans son quartier pourri, hanté par le traumatisme de la guerre. D'insomnies en désillusions, les virées enragées avec d'anciennes fréquentations ne vont que précipiter sa chute. Mais sera-t-il le seul à tomber ?
19:18 Publié dans 01. polars francophones | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook | |