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02/03/2022

La femme de pouvoir, d'Eric Découty

rouquine.jpgUne chronique de Cassiopée

On est en 1973, à Paris. Simon Kaspar travaille depuis un an à la Brigade mondaine. Il est arrivé à ses fins puisqu’il voulait absolument intégrer la police judiciaire, pas vraiment par passion pour ce métier mais surtout parce qu’il y a vingt ans, sa mère, qui menait une vie dissolue,  a été assassinée. Le meurtre non résolu, l’empoisonne et lui trotte dans la tête en permanence bien que sa grand-mère lui conseille de laisser tomber. Lui, il ne peut pas, il veut savoir, comprendre. Au boulot, il passe pour un jeune un peu trop consciencieux, un tantinet naïf, ne cernant pas forcément les « codes » du groupe. Alors, lorsque son chef lui donne comme responsabilité de supprimer tous les condés (autorisations qui couvrent les activités des proxénètes en échange d’informations surtout sur les personnalités connues), il voit là l’occasion de pénétrer, deux décennies après, le milieu où sa mère a évolué. D’autant plus qu’un nouveau meurtre d’une prostituée vient d’avoir lieu. Y-a-t-il un lien avec celui de sa Maman ?

C’est sur un fond historique très bien documenté qu’Éric Découty situe son récit. On rentre dans les arcanes du pouvoir, on cerne les manipulations d’envergure, on pénètre dans les secrets d’alcôve et on comprend très vite qu’en matière de politique et de police, tout n’est pas dit (comme maintenant d’ailleurs). Au début de l’ouvrage, il faut un petit moment pour bien repérer les nombreux protagonistes, leur mission et le rôle du groupe auquel ils appartiennent. Il y a d’ailleurs beaucoup d’informations en bas de page qu’il faut assimiler, dont certaines où l’auteur nous interpelle « Retenez bien ceci, on en reparlera plus tard par exemple). Une fois le décor planté, on est dans l’ambiance et on réalise vite qu’entre les paroles et les actes, un gouffre existe. Pourquoi ? Parce que chacun doit faire avec ce qu’il sait (ou suppose) et qu’il doit taire (ou dire sans vraiment en avoir l’air) et ce qui est « officiel ». A l’Élysée, tout n’est pas très net, certains gênent et il serait bon de les réduire au silence, si possible en les évinçant discrètement.

Simon commence ses investigations et sa mission, sans savoir où il met les pieds. Il rencontre sur sa route, plusieurs fois « La rouquine », une femme qui œuvre dans l’ombre, une mère maquerelle qui se permet de venir au « 36 », et qui donne des informations aux hommes de la PJ. Jusqu’où va son pouvoir ? Quels secrets détient-elle ? De qui est-elle proche ? Pourquoi tant de mystère autour d’elle ? Comment créer un lien avec elle afin de l’interroger ? Kaspar est jeune, maladroit, comment va-t-il agir face à celle qu’on compare à une espèce de Vidocq en jupons ? Comment se fait-il qu’elle semble connaître Claude Pompidou, l’épouse du président de l’époque ? N’a-t-on pas suggéré son nom pour des faits remontant à 1943 ?

En suivant Simon, le lecteur est au cœur de la vie parisienne, des rencontres qu’il fait, fortuitement ou pas, pour avancer dans son travail mais également pour élucider son passé en pensant à sa mère. Il ne sait pas ce qu’il va remuer, il se met en danger, il ne mesure pas les risques qu’il prend. C’est un peu « un électron libre » mais il est attachant dans ses maladresses. L’atmosphère est très bien retranscrite, que ce soit dans les bureaux des différentes organisations, en politique ou dans les hôtels de passe. On pourrait faire un film très complet de tout ça.

Cette lecture, ancrée dans un riche terrain historique est une belle découverte. L’auteur a une écriture agréable, précise et un style bien vivant. Un glossaire pour le vocabulaire typique et une présentation des personnages sont listés dans les dernières pages. Une excellente idée pour bien rester dans l’histoire et ne pas se perdre.

Éditions : Liana Levi (3 Mars 2022)
ISBN : 979-1034905362
448 pages

Quatrième de couverture

Paris, 1973. La Rouquine a étendu son empire dans tout Paris, de son bordel de luxe jusqu’aux hautes sphères de l’État. Un jeune flic de la Brigade mondaine, en cherchant à enquêter sur des assassinats de prostituées non résolus, va se heurter à cette figure de l’ombre. Rien n’a préparé Simon Kaspar, entré au prestigieux 36 avec une seule idée en tête – élucider par lui-même le meurtre de sa mère –, à affronter les réalités les plus troubles en ces derniers mois de la présidence de Pompidou.