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18/09/2015

Les jeunes filles et la mort, de Michael Genelin

genelin1.jpgUne chronique de Bruno (BMR).

 Pour celles et ceux qui aiment les histoires d'actualité

Les sirènes de l'émigration.

On a voyagé en classe polar depuis l'Amazonie jusqu'aux steppes d'Asie centrale en passant par le Pays du million d'éléphants ou le Pays Dogon [pour ne citer que quelques coups de cœur] ... on ne pouvait donc pas laisser passer cette promotion pour un voyage en ... Slovaquie (de quoi nous rappeler un 'vrai' voyage à Bratislava et dans les Tatras) !
L'américain Michael Genelin a travaillé pour le gouvernement US dans divers pays (dont la Slovaquie bien sûr) à la coopération internationale dans le domaine juridique : autant dire qu'il connait son sujet !
Les jeunes filles et la mort est la première enquête du commandant Jana Matinova, de la police de Bratislava.
Passée la surprise du style un peu rude de l'auteur (quelques grossièretés dans les dialogues), on se laisse prendre assez vite par la main de dame Matinova qui nous guide dans sa Slovaquie natale.
Pour nous en brosser le portrait le plus complet, les chapitres alternent entre l'enquête qui se déroule à notre époque et une tranche de vie de la période communiste d'il y a vingt ans (la vie passée de Jana), sans qu'on sache trop encore, pourquoi et comment les deux périodes vont se croiser ...
Mais on ne visitera pas que la Slovaquie puisque la commandante Jana Matinova viendra en mission à ... Strasbourg et Nice !
U.E. et souvenirs professionnels de l'auteur obligent.
On a donc droit à un amusant regard de ces étrangers (l'auteur US et l'héroïne slovaque) sur notre capitale alsacienne, à demi française, à demi européenne.

« [...] Strasbourg est une ville française encore tournée vers l’Allemagne. Une vieille dame qui se prétend jeune tout en vantant ses traditions millénaires. Une petite ville de province parée des habits d’une grande métropole cosmopolite. Bien que sa situation sur la frontière allemande en fasse un endroit reculé pour la plus grande partie de la France située à l’ouest, elle abrite aujourd’hui le Parlement européen ainsi que la Cour européenne des droits de l’homme. Les Français, qui ont la tête sur les épaules en matière d’argent, ont fait payer à l’Union européenne la facture des bâtiments modernes qui accueillent les bureaucrates, ainsi que leurs attributs remarquables nécessaires, fontaines, statues et autres drapeaux qui ornent l’endroit pour épater le touriste. La France s’est donc de nouveau trouvée fondée à se prétendre le centre du monde, même si les infrastructures européennes de cette capitale ont été élevées grâce aux bons offices d’autres nations. »

Et on apprend même que la présence russe à Nice ne date pas d'hier mais bien d'avant-hier : l'anecdote sur la princesse Kotchoubey est presque entièrement authentique et date de la fin du XIX°.

« [...] Sasha descendit de la limousine et grimpa les marches comme si elle était la princesse Kotschoubey en personne venant reprendre possession de son palais. »

Au fil des pages, on aura découvert également un autre attrait de cet intéressant voyage puisque l'enquête nous entraîne dans les arcanes de la traite des êtres humains (ici des jeunes femmes importées des pays de l'est, on l'aura deviné).

« [...] La Slovaquie est devenue une escale dans la traite des êtres humains en provenance de l’Est. La plupart d’entre eux sont des réfugiés qui fuient la misère, la guerre ou la famine. Des gens qui tentent un nouveau départ pour eux et leur famille. Mais on ne les découvre qu’une fois qu’ils ont succombé dans une remorque de camion, une soute de navire ou des conteneurs. »

Le bouquin original date de 2008 mais l'évocation de ces trafics honteux résonne d'un drôle d'écho en cette annéegenelin2.jpg 2015 qui voit notre Europe totalement dépassée par la question des migrants et des réfugiés.
Malheureusement, les propos sur ces trafics d'êtres humains resteront très superficiels : ils ne servent que de décor à l'enquête policière.
La traduction semble très correcte et l'écriture fluide, même si elle reste sans grande originalité, passe plutôt bien, d'autant qu'un humour pince sans rire est toujours présent.

« [...] Un peu de corruption bien placée ne nuit à personne. Ça me permet de faire mon boulot. Je l’aide, il m’aide. Un prêté pour un rendu. Quel mal peut-il y avoir à rendre service.
[...] — Je n’ai pas d’argent à te prêter.
— Je n’ai pas fait tout ce chemin depuis l’Ukraine pour te demander de l’argent.
— Tous les Ukrainiens ont besoin d’argent.
— Je suis policier.
— Ce sont les pires. Les flics ont toujours la main tendue. »

 On peut juste regretter quelques connexions peu vraisemblables et des péripéties finales un peu rocambolesques mais c'est souvent le cas au rayon polar quand on veut traiter plusieurs sujets dans une même intrigue. Bref, une agréable excursion en Slovaquie (via Strasbourg, Nice et l'Ukraine !) : la série continue et l'on aura plaisir à visiter de nouveau la Slovaquie en compagnie de la commandant Jana Matinova qui est tout à la fois (et c'est pas facile) amante, mère, flic et même grand-mère. Un personnage et un pays complexes qui méritent tous deux que l'on fasse mieux connaissance.

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Bruno ( BRM) : les coups de Coeur de MAM et BMR

 

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