04/03/2012
Et l'été finira, de Maurice Gouiran
Une chronique de Wanda
Nous sommes à la fin de l’été 1973. Clovis, le narrateur, vient d’obtenir un premier travail à l’agence France Presse à Paris.
C’est un jeune adulte insouciant, qui veut jouir de la vie et goûter au charme des vacances du côté de Marseille, avec mer et soleil, filles et copain. Il vient également voir son grand père Bati, qui vit dans un petit hameau proche de Marseille. Il a passé son adolescence chez ses grands parents, ses parents s’étant expatriés pour quelques années en Afrique.
Mais en cette fin d’été 1973, à Marseille, un déséquilibré nord africain tue un chauffeur de bus marseillais, et c’est le début de meurtres de nord africains que la presse de droite veut faire passer pour des règlements de comptes entre bandes rivales.
Au début, Clovis ne s’intéresse que très peu à ces évènements dramatiques, bien qu’il soit aiguillonné par Olivia, une de ses amies, militante de gauche, jusqu’au meurtre de son ami Ali/Alain, qu’il décide d’élucider.
Il se trouve alors pris dans la tourmente des meurtres qui ont lieu et devient lui-même une cible, avec son amie Olivia. Des maladresses de sa part lui font également craindre la police, qui enquête très mollement, noyautée par des ressortissants français d’Algérie, habités par la haine du nord africain, attisée par une presse xénophobe.
Le thème est très actuel : l’auteur montre la constance de la xénophobie, en faisant un parallèle entre la situation des nord africains en cet été 1973 et celle des ouvriers italiens, 80 ans avant, chassés et en partie tués par cette même haine de l’étranger. Lesquels italiens, en 1973, ont oublié ce qu’ils avaient vécu et développent (une grande partie d’entre eux en tout cas) un discours violemment anti nord africain.
L’intrigue est honnête et mêle assez habilement la description des meurtres nord africains, et ceux de fonctionnaires marseillais, pris dans une magouille de fausses factures. Les enquêtes de la police ont toutes débouché sur des non-lieux, les assassins n’ont jamais été pris. Le livre s’achève par ce constant, un peu amer, mais qui nous révolte quand on pense au sort que notre pays réserve, aujourd’hui, à certains immigrés.
L’auteur ne joue pas avec le « classique » suspense du polar, ce n’est pas sa priorité, il cherche plutôt à nous réveiller pour examiner en nous ce qui reste de xénophobie, celle « naturelle » et celle attisée par certains discours politiques, que l’homme de la rue, souvent oublieux de ses origines, reprend à son compte.
C’est sans doute, pour moi, le plus intéressant, et le plus inquiétant, que nous montre ce livre, notre haine ordinaire qui change de camp, en fonction des situations. « On est toujours l’arabe de quelqu’un »
Wanda, le 4 mars 2012
Et l’été finira »
Maurice Gouiran
Editions Jigal
18,50 €
Présentation de l'éditeur
Nous sommes à la fin de l'été 1973. Clovis, qui vient de terminer ses études et de décrocher un premier job à Paris, s'accorde un mois de vacances du côté de Marseille. Au programme : le soleil, la mer, les filles et les copains... Mais en août, le climat de la ville se détériore brutalement suite à l'assassinat d'un chauffeur de bus par un déséquilibré nord-africain. Meurtres et ratonnades vont dans les semaines suivantes pourrir l'atmosphère de la cité phocéenne. Règlements de comptes entre bandes ou résurgence de la xénophobie... ? La police enquête mollement, la presse souffle sur les braises et la rue réagit violemment. C'est en cherchant à élucider le meurtre de son ami Ali que Clovis va se retrouver très vite au centre de la cible...
17:13 Publié dans 01. polars francophones | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook | |
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