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25/08/2015

Piste noire, d’Antonio Manzini

manzini1.jpgUne chronique de Bruno (BMR).

 Pour celles et ceux qui aiment les sports d'hiver.

L'ours qui aimait la polenta.

Hmmm ...
Joli petit coup de cœur pour ce petit polar à déguster cet hiver au coin du feu entre une polenta et un vin chaud parce que cela se passe dans une station de ski du Val d'Aoste.
Décidément l'Italie n'a pas fini de nous surprendre au rayon polars : après les péripéties juridiques de l'avocat des Pouilles de Gianrico Carofiglio, après les saisons napolitaines de Maurizio de Giovanni, après le florentin Marco Vichi, voici donc une nouvelle série d'Antonio Manzini qui démarre la saison d'hiver avec son commissaire Rocco Schiavone : Piste noire.
Le commissaire Rocco (pardon : le sous-préfet Rocco, on ne dit plus commissaire parait-il) est un sacré personnage comme on en rencontre rarement sur nos étagères : imbu de lui-même, méprisant avec ses subordonnés, insolent avec ses chefs, séducteur macho avec les dames, arrogant avec les montagnards de province, odieux, corrompu, violent, et j'en passe.
Pour faire bonne mesure, Rocco ne décolère pas après cette mutation au fin fond du Val d'Aoste, en province donc, lui qui ne jure que par sa capitale romaine (un parisien de la botte quoi !). Une mutation plus ou moins disciplinaire, on ne sait pas trop encore (il faudra attendre les prochains épisodes pour en savoir plus) mais on se doute que Rocco a fait une grosse bêtise à la grande ville.

« […] L’étoile de Schiavone avait déchu, précipitée par un transfert disciplinaire rapide et discret dans le val d’Aoste.
[...] Caterina Rispoli penchait pour une indélicatesse. « Il aura marché sur les pieds de quelqu’un de haut placé. C’est facile, à Rome. » Deruta était sûr qu’il dérangeait parce qu’il était trop bon et pas pistonné. D’Intino soupçonnait une liaison. « Peut-être qu’il a touché une femme qu’il ne fallait pas toucher. »

 Bref, le sous-préfet Rocco Schiavone qui a une conception très particulière des contrôles douaniers et utilise des méthodes très personnelles de prélèvement sanguin pour son enquête, est de ceux que l'on préfère ne pas croiser sur son chemin. Mais nul doute que l'on va se précipiter sur le prochain épisode dans notre hâte de retrouver cet affreux et exécrable bonhomme ... tant nous nous y sommes attachés !
Rocco débarque donc au Val d'Aoste en plein hiver avec son loden sur le dos et ses clarks aux pieds : des chaussures de ville bien vite trempées comme des serpillères mais qu'il se refuse à changer pour de disgracieux croquenots de plouc de montagne.

« [...] Le sous-préfet regarda ses pieds. Ses Clarks étaient déjà complètement mouillées, le daim était imbibé d’eau et l’humidité pénétrait dans ses chaussettes. « Monsieur, je vous avais dit qu’il fallait vous acheter une paire de chaussures adaptées.
— Pierron, ne me casse pas les couilles. Moi vivant, je ne mettrai pas ces bétonnières que vous portez aux pieds. »
[...] À présent, ses pieds ressemblaient à deux filets de sole surgelés. »

Pour l'accueillir, un beau soir de lune, les dameuses vont découvrir écrabouiller un cadavre sur une piste noire. Bonjour la scène de crime.

« [...] J'ai vu des hérissons en meilleur état sur l'autoroute. »

Dans ce petit village où tout le monde se connait et se retrouve plus ou moins apparenté, l'enquête plutôt pépère (on s'y intéresse moyennement, attachés que nous sommes aux clarks de Rocco) l'enquête nous change agréablement des trépidations politico-sociales habituelles dont est devenu coutumier le genre polar.

« [...] — Les rumeurs circulent. Vous savez pourquoi je vous dis ça ? Nous sommes tous un peu parents. Ce n’est pas comme à la ville. Tout le monde sait presque tout sur tous. »

Loin de nos Harry's habituels (Harry Bosch ou Harry Hole), Rocco serait plutôt un fils spirituel de Sherlockmanzini2.jpg Holmes ou d'Hercule Poirot, ce qui nous vaut d'ailleurs un dénouement pas piqué des hannetons dans l'église du village où Rocco déboule le jour même de l'enterrement de la victime, armé de son mandat d'arrêt !
Rocco ne respecte personne, pas plus les curés que les autres !
L'écriture de Manzini est fluide et agréable, le bouquin se lit rapidement et l'on se marre franchement car c'est fortement assaisonné d'un humour féroce et sarcastique.

« [...] Vous, les Romains, vous êtes trop sympas !
— Tu trouves ?
— Oui. Vous avez l’air fermés et méchants, mais en fait vous êtes tout le temps en train de blaguer.
— Si tu vois ça comme ça. »

C'est le premier épisode traduit en français et l'on attend les suivants avec impatience, pressés de retrouver ce 'drôle de personnage'.
Mais cette fois le coup de cœur, lui, n'attendra pas.

 

Bruno ( BRM) : les coups de Coeur de MAM et BMR

 

Piste noire
Antonio Manzini
Editions Denoël (mai 2015)

Collection Sueurs froides
256 pages


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