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19/02/2011

La gagnante du concours 2011 de la meilleure critique d'un polar

La gagnante du concours 2011 de la meilleure critique d’un polar est : Liliba, avec son article sur le roman de Georges Flipo :  la commissaire n’aime point les vers.

De nombreuses critiques, souvent excellentes, nous ont été été envoyées. Nous publierons prochainement les meilleures d'entre elles.

 Voici  l'article de Liliba.

  

 Le sonnet meurtrier

 Georges Flipo est un auteur intéressant, qui réussit avec succès à changer de registre et nous surprendre à chaque nouvel ouvrage. Après trois très jolis recueils de nouvelles, La Diablada, Qui comme Ulysse, puis L’étage de Dieu, il nous a offert un vrai roman sur les affres de la création littéraire, Le vertige des auteurs, puis un roman un peu fou et très drôle : Le film va faire un malheur. Je me suis donc plongée avec joie dans son nouvel opus, un polar cette fois-ci.

 Mais un polar troussé par cet auteur prend déjà une certaine dimension ! Parce qu'il y a polar et polar et qu'il est assez rare d'arriver à plonger dans une histoire au suspense continu tout en gardant un texte de qualité, un minimum de psychologie des personnages, un brin d'humour... Bref, nous avons ici un polar "littéraire" qu'il faut, chers lecteurs, vous empresser de lire !

 Je ne vais pas résumer l'histoire pour ne pas gâcher votre plaisir de lecture, mais juste souligner les quelques (nombreux) éléments de ce roman qui m'ont plu.

 Le titre, tout d'abord. J'adore ce "point" qui donne un petit coté obsolète, décalé, si loin de la réalité qu'on imagine pour une commissaire de police. "Point", c'est du langage ancien, totalement suranné et cela nous emmène directement sur les vers qui suivent, de vrais vers de poésie, avec des rimes, des vraies, riches et chantantes. De la poésie dans un polar ? Et du Baudelaire qui plus est ? Ah ah, voilà qui est déjà bien intriguant ! J'aime aussi beaucoup l'illustration qui cerne bien le personnage central : commissaire ET femme. James Bond girl ? Ce n'est pourtant pas son profil du tout, mais je ne peux pas m'empêcher d'y penser...

 Parlons donc de cette commissaire : Viviane Lancier est une femme comme on les aime (comme je les aime), forte et faible à la fois, touchante, émouvante, avec ses défauts, ses angoisses et ses fêlures. Cela ne l'empêche pas d'être à la tête du service et de manager son équipe d'hommes d'une main de maître, usant d'autorité aussi bien que de persuasion. J'ai beaucoup ri à la lecture de ses déboires, surtout ses tentatives désespérées pour perdre un peu de poids ! Madame la commissaire est une femme de terrain intelligente et efficace dans ses fonctions mais terriblement complexée et mal dans sa peau. Elle ne peut s'empêcher de se précipiter sur les barres chocolatées salvatrices en cas de crise, tente régulièrement de rentrer dans son ensemble rose qui continue désespérément de la boudiner... Je pense que beaucoup de lectrices ont dû, comme moi, avoir l'impression de se regarder dans un miroir à certaines périodes de leur vie quand nos jeans restent désespérément trop serrés (voire quand on ne rentre carrément pas dedans !). Ce combat permanent contre les kilos, s'il cache une vraie souffrance de l'héroïne, est décrit avec tant d'humour que j'ai ri de bien nombreuses fois. L'auteur a dû épier bon nombre de femmes pour faire ressortir aussi bien leurs soucis sur ce sujet délicat !

 Donc, la vie affective de la commissaire est bien morne et triste, et c'est à corps perdu qu'elle reporte son énergie sur son travail et mènera tambour battant l'enquête qu'on lui confie. Il faut dire que cette nouvelle enquête est pour le moins originale et tordue et que la commissaire ne sait pas très bien au départ comment en dénouer les fils. Un pauvre sans logis retrouvé mort, un sonnet attribué à Baudelaire, rien que ça, et voilà toute l'équipe sur le pied de guerre, qui va tenter de comprendre pourquoi ce poème semble semer la mort autour de lui...

 La culture et la finesse du jeune et charmant lieutenant Augustin Monot, de même que ses intuitions et ses initiatives parfois peu orthodoxes au sein de la police, aideront la commissaire Lancier dans son enquête. Elle le rudoie un peu parce qu'il est le petit nouveau de l'équipe et que c'est énervant à la fin, d'être toute la journée en face d'un collègue aussi mignon, attirant même... mais, honnête et professionnelle, elle reconnaît également ses mérites. Cette fine équipe dont les caractères se complètent à merveille va finalement résoudre les énigmes les unes après les autres, après moultes péripéties.

 Intrigue bien ficelée sans être trop complexe, quelques clins d'œil au milieu des experts érudits, quelques clichés épinglés sur les services de la police, sur le monde des médias, sur la grande bourgeoisie, des portraits de personnages très bien brossés, l'humour toujours qui surgit entre les lignes, la tendresse de l'auteur pour ses personnages, le sonnet de Baudelaire qui revient au fil des pages comme une rengaine... on se laisse bercer par cette histoire au suspense soutenu et vraiment drôle. Un polar, donc, mais un bon polar qui se lit d'une traite avec grand plaisir. J'ai dévoré ce livre en deux soirées, et j'attends avec impatience de retrouver les personnages dans un deuxième tome ! D’autre part, ce livre est tellement vivant et "visuel" qu'on imagine automatiquement ce qu'il pourrait devenir en téléfilm. Je vous le recommande donc !

  Liliba

http://liliba.canalblog.com

http://redactiv-nord.fr