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24/04/2011

Nymphéas noirs, de Michel Bussi

lesnympheasnoirs.jpgUne chronique de Christine

Il fait beau ! Les cerisiers du japon inclinent leurs branches encore lourdes de fleurs tandis que les pétales, en tombant, couvrent le sol d’une pluie rose. Les herbes se font hautes et folles pour que narcisses et muscaris jouent à cache-cache. Les bassins se ponctuent de lentilles d’eau et les nénuphars préparent leur floraison. Pourquoi pas sortir toiles, pinceaux et couleurs, et aller profiter de la quiétude du printemps pour immortaliser coquelicots et nymphéas ?

Après tout, il y a des précédents célèbres.   Pourvu que le décor reste champêtre et serein…

    Le peintre assis devant sa toile, a-t-il jamais peint ce qu’il voit … *

  Giverny. Les visiteurs affluent du monde entier pour la beauté de ses jardins, pour retrouver les décors qui ont permis à Claude Monet de devenir l’un des pères de l’Impressionnisme. Douceur de vivre, lumière, inspiration. Mais la douceur n’est qu’apparente car la découverte du corps de Jérôme Morval va venir perturber le cours des évènements. Qui a pu assassiner ce notable, fils du pays et chirurgien ophtalmologiste de renom ?

L’homme était volage. Multipliant les conquêtes, mais obsédé depuis toujours par la belle Stéphanie Dupain. L’institutrice de la seule classe de Giverny. Troublante, mystérieuse.
Et mariée.
Est-ce un crime passionnel ?
L’homme était également collectionneur et semblait prêt à tout pour obtenir un authentique« Nymphéa ».

Crime lié à un trafic d’œuvres d’art ?

L’enquête va être menée par l’inspecteur Laurenç Sérénac, récemment nommé au commissariat de Vernon, assisté de Sylvio Bénavides.

Sérénac fonctionne à l’instinct, Sylvio est beaucoup plus pragmatique.

Sérénac opte pour la piste passionnelle, mais, attiré par Stéphanie, il a bien du mal à rester neutre et objectif.

Sylvio, lui, étudie toutes les hypothèses, ne néglige aucun détail. Travail long, parfois gratifiant, souvent ingrat. Mais qui le conduit vers un crime quasi semblable commis presque 30 ans auparavant.

Trois personnes pourraient avoir beaucoup à dire, si elles le voulaient.

Fanette, une petite fille de 11 ans, vraiment très douée pour la peinture. Mais qui se soucie d’une petite fille ?

Stéphanie, aussi fougueuse qu’étrangement résignée. Mais qui a envie de savoir ce que pense réellement une femme séduisante ?

Une femme très âgée, dont on ignore le nom. Tellement âgée qu’elle en est presque devenue invisible aux yeux des autres. Un fantôme, qui voit sans être vu. Mais qui s’intéresse à un fantôme ?

Qui, parmi les trois, possède la clé de l’énigme ?

 Sur l’eau calme voguant sans trêve, Dans l’éclat du jour qui s’achève, Qu’est notre vie, sinon un rêve ? **

 Un roman qui commence comme un conte : « Il était une fois, trois femmes… »

Mais ici, le décor n’est pas celui d’un conte de fée. Il s’agirait plutôt d’une succession de tableaux, d’une succession de moments volés au temps et que l’on aurait figés, d'une succession de différentes impressions.

Le mot est lâché : "impression".

Un roman qui place le point de départ de son intrigue dans une ville tout entière vouée au culte de son habitant le plus célèbre : Claude Monet.

Entrez dans le décor. Visitez Giverny avec un guide qui en connaît chaque pierre, chaque ruelle, chaque jardin.

Entrez dans l’histoire, faite d’un mélange habile de faits réels et de fiction.

Le style est vivant, coloré, nuancé.

La narration se fait sous forme de récits croisés, comme plusieurs pinceaux pour dessiner plusieurs toiles. Plusieurs toiles autour du même sujet, offrant des visions différentes selon les éclairages, selon l’instant, et selon le peintre.

De même que Monet s’obstinait sur la fin à peindre des nymphéas, encore et toujours, offrant au spectateur de ses toiles une vision sans cesse renouvelée d’un seul et même sujet, le lecteur va voir apparaître des facettes sans cesse différentes d’une seule et même histoire : celle du temps qui passe, des illusions qui surgissent et s’effacent, celle de la vie.

Finalement, qu’importe passé ou présent, puisque seules comptent les impressions laissées en mémoire ?

Il vous sera très difficile de deviner le dénouement, vous serez pris dans les filets d’une construction originale et redoutablement efficace.

Pour ma part, j’ai envie de dire « les dénouements » car je me garde le droit de choisir une option plutôt que l’autre, un angle de vue plutôt qu’un autre, selon « l’impression du moment ».

Après tout, être lecteur ne veut pas dire être passif.

Suivez ces trois personnages féminins, intrigants, troublants, attachants. Acceptez de ne pas tout comprendre au premier coup d’œil.

Un roman entre Art et polar ; un pol’art savoureusement atypique.

 * les oiseaux déguisés ; Louis Aragon

** De l’autre côté du miroir ; Lewis Carroll

Christine
(Blog : Bibliofractale )



 Présentation de l'éditeur

Tout n'est qu'illusion, surtout quand un jeu de miroirs multiplie les indices et brouille les pistes. Pourtant les meurtres qui troublent la quiétude de Giverny, le village cher à Claude Monet, sont bien réels. Au coeur de l'intrigue, trois femmes : une fillette de onze ans douée pour la peinture, une institutrice redoutablement séduisante et une vieille femme aux yeux de hibou qui voit et sait tout. Et puis, bien sûr, une passion dévastatrice. Le tout sur fond de rumeur de toiles perdues ou volées, dont les fameux Nymphéas noirs. Perdues ou volées, telles les illusions quand passé et présent se confondent et que jeunesse et mort défient le temps.

 

Nymphéas noirs

Michel BUSSI

Presses dela Cité(Terres de France)

437 pages ; 21 euros