13/03/2013
« 22/11/63 », de Stephen King
Une chronique de Christine.
Nous sommes en 2011, dans le Maine, une région dans laquelle Stephen King a situé nombre de ses romans. Jake Epping, un homme d’une trentaine d’années, y est professeur d’anglais au lycée de Lisbon Falls. Pour arrondir ses fins de mois, il donne des cours de remise à niveau pour adultes.
Un jour, il leur propose un devoir à faire ayant pour thème « Le jour qui a changé ma vie ». Sans pouvoir évidemment prendre conscience qu’une des copies sera un des éléments déclencheurs d’une série d’évènements qui vont bouleverser sa propre vie. La lecture de ce qu’a rédigé Harry Dunning, le concierge du lycée, va l’émouvoir profondément et influencera certaines de ses décisions futures.
Jake a pour habitude d’aller déjeuner régulièrement dans un fast-food tenu par Al Templeton. Installé dans une roulotte, c’est un endroit qui ne paie pas de mine, auréolé d’une réputation de boui-boui peu fréquentable, mais qui est pourtant convivial et chaleureux. Jake et Al ont plaisir à discuter ensemble sans toutefois être très proches l’un de l’autre.
C’est donc avec surprise qu’un soir Jake reçoit une invitation d’Al à venir le voir de toute urgence. Il découvre alors que l’homme qu’il a quitté la veille en parfaite santé est maintenant un vieil homme en phase terminale d’un cancer.
Et c’est là qu’Al va lui faire une incroyable révélation : il y a là, tout près, au fond de la roulotte, un passage permettant de remonter le temps !
De quitter 2011 pour se retrouver en 1958 !
Al l’a emprunté bien des fois, ce sas temporel. Pour de courtes périodes d’abord, puis avec en tête cette idée qui s’est imposée peu à peu : et s’il avait ainsi la possibilité d’empêcher l’assassinat de J.F. Kennedy à Dallas en 1963 ?
Mais Al est trop malade, ses jours sont comptés, et il demande à Jake de prendre le relai pour mener cette mission à bien.
Bien sûr, je pourrais continuer mon résumé en détaillant les rencontres de Jake, sa plongée dans l’Amérique de la fin des années 50, ses nombreuses interrogations sur la manière dont ses actes vont influencer le futur, et comment ce passé en cours d’écriture résiste à toute intrusion. Mais j’ai pris tellement de plaisir à tourner les pages, à m’interroger sur les rebondissements à venir, à attendre impatiemment de reprendre ma lecture lorsque j’étais obligée de l’interrompre, que j’aurais de suite pendu haut et court la première personne qui aurait essayé de me dévoiler un morceau, même infime, de l’intrigue.
Il vous faudra donc vous contenter du bref résumé des premières pages, et découvrir par vous-même toute la richesse de ce livre.
J’ai eu beau traquer la moindre faille de raisonnement dans le maniement du paradoxe temporel, je n’y suis pas parvenue. Le zeste de fantastique introduit par ce voyage dans le temps ravira les plus rebelles au genre « SF/fantastique ».
Le sas temporel, et la manière dont il fonctionne, dont les personnages l’utilisent, est une trouvaille de génie.
Quant aux lecteurs fidèles de Stephen King, ils retrouveront avec plaisir les thèmes favoris du Maître : les énergies sombres de certains lieux (avec un clin d’œil au livre « Ça »), le mal sournois et la folie qui ronge certains hommes, les destins malmenés, l’interaction des personnages divers, le décryptage de la notion de réalité, le tout avec un talent de conteur hors du commun.
L’immersion dans cette époque très précise de l’Amérique montre le décalage entre une Amérique devenue fantasmée (c’était mieux avant) et ce qui en a été occulté dans les mémoires : le racisme ambiant, le statut de la femme dans la société, les codes de comportement, et tant d’autres domaines encore.
Cette question posée : « Et si J.F.K. n’était pas mort à Dallas ?», la majorité des Américains doit l’avoir à l’esprit.
Stephen King y apporte une réponse, sa réponse.
Et c’est un grand moment de lecture !
En entrecroisant Histoire et histoire avec tout le talent qu’on lui connaît, avec une foule de petits détails soignés et précis (sur le mode de vie, sur les personnages, sans oublier la musique des années 60 qui accompagne la lecture !) et avec une merveilleuse histoire d’amour en prime, il nous offre un palpitant voyage dans le temps.
Un incroyable roman de 936 pages qui se lisent avec une facilité déconcertante, passionnant du début jusqu’à la fin, que vous seriez impardonnable de ne pas chercher à vous procurer d’urgence !
Christine, (Blog : Bibliofractale)
22/11/63
Stephen King
Albin Michel
936 pages ; 25,90 euros
14:57 Publié dans 06. Il y a une vie hors du polar ! | Lien permanent | Commentaires (2) | Facebook | |