24/04/2012
La femme congelée, de Jon Michelet
Une chronique d’Astrid
Voici un roman qui porte bien son titre et dont la lecture laisse de marbre. Pourtant auréolé du prix du meilleur polar cru 2012 par les lecteurs de Points, la femme congelée est un roman terne écrit par un Jon Michelet à la plume aussi glaciale qu’un hiver sans fin aux abords d’un Fjord Norvégien.
Tout commence par le cadavre d’une femme à la peau bien trop brune pour être une descendante de vikings. Une femme retrouvée morte de froid et atrocement mutilée dans le jardin de Vilhelm Thygesen. Ex flic sulfureux aux convictions gauchistes, Thygesen exerça un temps pour des organisations louches ses talents d’avocat et finit par être accusé de meurtre. Pas de retraite paisible, ni de jardinage à l’ombre du petit livre rouge pour notre Che Guevara du nord porté sur l’aquavit, qui se trouvera pris en tenaille dans une enquête dont il est le suspect idéal. Une enquête sur fond de bandes de motards, de corruption, de magouilles politiques et de trafics d’amphétamines dont devront s’accommoder les Inspecteurs Stribolt et Vaage en charge de faire la lumière sur l’affaire. En arrière-plan, les paysages grandioses d’une Norvège violente et xénophobe au système judiciaire poussiéreux. «-Et je pense aux flics de Norvège – un aperçu de notre avenir dans cette partie de la forteresse Europe où nous habitons, cet espace où les sans papiers issus de la pauvreté du « Bienloinnistan » s’efforcent à tout prix d’entrer. La plupart pour trouver leur bonheur sous forme de travail et d’argent, mais certains aussi, condamnés à une mort brutale, pour aller au-devant de leur malheur … ». Improbable Eldorado du bonheur.
Premier livre de l’auteur traduit en français, « La femme congelée » surfe sur la vague du succès des romans venus du nord. Mais n’est pas Arnaldur Indridason qui veut. Là où le romancier Islandais sait planter le pic à glace de l’hiver arctique dans le cœur de ses lecteurs, Jon Michelet ne reste qu’à la surface du glacier. Ancien militant d’extrême gauche, l’auteur tente de nous croquer une Norvège aussi injuste socialement qu’âpre et corrompue. Une Norvège bien loin de l’image d’Epinal encensée par les médias européens. Force est de constater que l’actualité récente relayée par Anders Behring Breivik semble lui donner raison. Mais un auteur ne doit-il pas aussi emporter son lecteur dans d’autres contrées que celles de l’idéologie politique ? Et c’est justement ce voyage littéraire qui fait défaut à ce roman souffrant d’une construction anarchique et d’un style aussi pesant que péniblement traduit. Le lecteur assoiffé d’intrigues finit embourbé dans des réflexions sociétales lassantes. Les personnages de papier de Jon Michelet ne nous font pas voguer sur le drakkar de leur imaginaire et à défaut d’être de valeureux guerriers peut-être sont-ils à l’image d’une société norvégienne trop lisse couvant en elle les prémisses d’une folie meurtrière.
Si vous aimez le froid, le vrai, celui dont on ne revient pas, dévorez plutôt sans tarder les romans d’Arnaldur Indridason, dont l’universalité du message vous réconciliera avec le souffle de l’hiver.
Titre : La femme congelée
Auteur : Jon Michelet
Nombre de pages : 341
Traduit du norvégien par : Eric Eydoux
Editeur : Presses universitaires de Caen, 2011
présentation de l’éditeur :
Le cadavre d’une femme est retrouvé dans le jardin de Thygesen. Le passé de cet ancien policier en fait un suspect idéal : il a été mêlé à plusieurs affaires criminelles et accusé de meurtre. L’évidence de sa culpabilité semble arranger beaucoup de monde… Car une enquête approfondie menacerait de révéler les trafics des mafias et la corruption politique d’un pays jusque-là jugé modèle. La Norvège.
16:02 Publié dans 03. polars nordiques | Lien permanent | Commentaires (2) | Facebook | |
Commentaires
Joli titre, en tout cas, pour un roman venu du froid.
Écrit par : Alex-Mot-à-Mots | 24/04/2012
Oui le titre est bien. Heureusement qu'il y a le titre. C'est d'ailleurs le titre qui m'a incité à découvrir ce roman qui souffre malheureusement d'un vrai problème de traduction. Au plaisir d'échanger avec vous. Astrid
Écrit par : Astrid | 25/04/2012
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