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12/07/2012

Blood Hollow, de W. Kent Krueger

blood_hollow_w_kent_krueger.JPGUne chronique de Jacques.

Encore un remarquable thriller qui nous vient des Etats-Unis ! Je dis « thriller » car c’est écrit sur la couverture, mais cette catégorisation est – comme souvent – approximative. En effet, Blood Hollow est tout aussi bien un polar classique à suspense dans lequel l’enquête policière (menée par un ex-sheriff) est magistralement menée et l’intrigue subtile et complexe à souhait.

 Comme dans Aurora, Minnesota, le précédent roman de W. Kent Krueger publié également par les éditions le Cherche Midi,  nous retrouvons le même lieu et le même personnage principal Corcoran Cork O’Connor, descendant d’irlandais par son père et d’amérindiens Ojibwe par sa mère. Le lieu, dans les romans de Krueger (une bourgade à taille humaine perdue dans une nature aussi magnifique que magnifiée par l’auteur) est  un personnage à part entière. Dès les premières pages, une équipe de sauveteurs à la recherche d’une jeune fille disparue est confrontée à un blizzard qui nous vaut de belles descriptions et (déjà) une pointe de suspense, puisqu’il met en danger la vie du personnage principal, l’attachant Cork O’Connor. 

 Le point de départ de l’intrigue est classique, comme vous pouvez en juger  : une jeune fille, Charlotte Kane,  assassinée la nuit de la Saint Sylvestre et dont le corps est retrouvé au printemps, après la fonte des neiges ;  son ex-petit ami un jeune indien Ojibwe beau et tourmenté, soupçonné du meurtre ; Cork qui  doute de sa culpabilité et  va tenter de découvrir ce qui s’est réellement passé avec l’aide de sa femme Jo, par ailleurs avocate…

 Plusieurs choses font cependant l’originalité de ce livre.

Tout d’abord, la religion (et même la religiosité) y tient une place centrale, ce qui n’est pas si fréquent dans les polars.  Le catholicisme  imprègne la famille de Cork, sa femme, ses filles, sa belle-sœur et influence aussi « en creux » de nombreux autres personnages. Cork lui-même traverse une période de doute qui va le pousser à se poser des questions métaphysiques, d’autant plus qu’il sera amené à croiser fréquemment le chemin du charismatique père Mal Thorne. Des réflexions sur la foi, les miracles, le rapport à Dieu courent à travers le livre et lui donnent ainsi une tonalité particulière. Mais la religiosité est également liée à certains des personnages d’indiens Ojibwe, dont les traditions ancestrales se mêlent au christianisme. 

 Et, justement, l’autre originalité du roman tient  à l’importance que W. Kent Krueger accorde à la culture amérindienne, à travers des personnages que Cork admire : Sam Winter Moon, qui avait été le meilleur ami de son père et dont il gère  maintenant le snack-buvette Chez Sam, mais aussi Henry Meloux, le vieux sage qui avait été jadis amoureux de sa grand-mère. Là aussi, rien de pesant ou de didactique : l’auteur nous distille sa vision et sa connaissance de cette culture  au fil de rencontres et de réflexions des différents personnages, mais il le fait sans insister, en conservant toujours une cohérence dans l’intrigue, et cet élément donne  au personnage de Cork O’Connor une richesse et une humanité certaines.

 Mais si le point de départ de l’intrigue est classique (un meurtre à élucider pour lequel il y a un suspect initial et un enquêteur qui cherche à trouver la vérité) , son traitement est d’une grande habileté. Ce roman joue du début jusqu’à la fin sur les apparences trompeuses, les faux-semblants, puisque chacun des suspects se révèle très différent de son image publique, plus complexe et masquée. Le travail de Cork consiste à enlever les pelures d’oignon successives dont ils se sont recouverts pour arriver enfin au cœur de leur personnalité et comprendre – dans la mesure du possible – qui ils sont vraiment. Et cela ne se fait pas sans drame dans la petite communauté d’Aurora, et même dans la famille de l’enquêteur qui va être également bousculée par des révélations multiples. Et Cork n’en ressortira pas non plus intact : en apprenant sur les autres il se comprendra mieux lui-même et la fin du roman sera le moment des  remises en cause personnelles, des doutes, des interrogations.

 Le spectaculaire coup de théâtre final nous permet de comprendre ce qui s’est réellement passé le jour de la Saint Sylvestre, ainsi que les raisons de la mort de Charlotte, et il permet à l’auteur une fin éblouissante en créant un suspense  tel qu’il est impossible de lâcher le livre dans les trente dernières pages, justifiant pleinement  (pour le coup) l’appellation de « thriller » choisie par l’éditeur.

 Un excellent roman donc, solide, plaisant, passionnant de bout en bout !

 Jacques (lectures et chroniques)

 

Blood Hollow
W. Kent Krueger
Traducteur : Sophie Aslanides
Editions Le Cherche Midi (13 septembre 2012)
479 pages; 20 €
 

 

Quatrième de couverture :

 

Aurora, Minnesota. Charlotte Kane, la fille d'une des familles les plus riches de la ville disparaît le soir du Nouvel An. Toutes les recherches restent vaines. Quelques mois plus tard, lors de la fonte des neiges, on retrouve son corps. Son petit ami, Winter Moon, un Indien de la réserve Ojibwe, soupçonné de l'avoir assassinée, s'enfuit, ce qui accrédite la thèse de sa culpabilité. L'ex-shérif Corcoran « Cork » O'Connor, persuadé de l'innocence du jeune homme, redoute le besoin de vengeance de la famille Kane, et craint une flambée de violence envers les Indiens de la part des habitants les plus réactionnaires de la ville. Quand Winter Moon se livre contre toute attente aux autorités, des événements étranges et inexplicables commencent à se produire, qui vont bientôt bouleverser la vie paisible de la petite communauté, dont la surface tranquille cache des eaux bien plus troubles qu'on ne le pense.

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