Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

01/11/2020

Noir côté cour, de Jacques Bablon

51NOPMoctfL._SX195_.jpgUne chronique de Cassiopée

Goutte d’eau….

C’est insidieux une goutte d’eau, ça se glisse, ça dégouline, ça passe entre les lattes du plancher, ça descend chez le voisin et ça peut faire des dégâts….C’est par l’intermédiaire de cette goutte que nous allons visiter un petit immeuble parisien de cinq étages. Une cour pavée, des caves, des fenêtres complètent l’ensemble. Sur la pointe des pieds, le lecteur accompagne la goutte et passe sur les différents paliers. Derrière chaque porte, des hommes, des femmes, ordinaires, des gens qui semblent discrets, ne cherchant pas à se faire remarquer. Certains observent silencieusement, d’autres attendent une opportunité ou fuient doucement, un seul ne bouge plus, se tait, il est mort. L’eau le frôle, il ne sent rien….

Qui sont tous ces gens, qu’ont-ils en commun ? Ils partagent ou ont partagé la même résidence. Parfois ils se parlent un peu, parfois pas du tout. Il y a ceux qui vivent leur vie sans s’occuper de ce qui se passe, d’autres observent, surveillent, analysent chaque fait et geste.

Jacques Bablon est un minimaliste, en quelques mots bien ciblés, il campe un décor, décrit ses protagonistes et dès les premières lignes, on est dans l’histoire. Comment, en si peu de phrases, peut-il planter une atmosphère, nous faire partager les tourments, les joies, les secrets de chacun ? Tout simplement parce qu’il utilise un vocabulaire précis, pointu, des phrases courtes sans fioriture. Ça frappe fort, ça va à l’essentiel et ça suffit largement pour qu’on comprenne que la vie, très souvent, c’est une succession d’événements infimes, de hasards, qui modifient le cours d’un quotidien que l’on croyait bien réglé. Rien n’est acquis, rien n’est défini.

Les habitants de l’immeuble nous le démontrent.  Quand on sait ce qu’ont fait les voisins, ou ce qu’ils font ou ce qu’ils voudraient faire, on a comme une forme de pouvoir sur eux et on peut agir pour interférer sur leur avenir. Ils n’ont pas une vie facile, et elle ne leur fait guère de cadeaux…. Alors ils cherchent, imaginent, envisagent ce qui pourrait être … En parallèle, on se demande qui a assassiné l’homme trouvé mort et comment tout cela va s’imbriquer ….

Dans ce court roman, Jacques Bablon évoque, par petites touches, des sujets brulants, d’actualité : les Black Bloc, les migrants, les hommes non respectueux des femmes, la famille et la place prépondérante qu’elle tient chez chacun de nous etc. Tous les individus évoqués sont reliés par le lieu où ils vivent. Leur bâtisse est le point commun. J’ai trouvé cela intéressant et je verrai bien une adaptation en film (de préférence dans l’immeuble de la photo de couverture, où a-t-elle été prise ?)

Ce qui me plaît chez Jacques Bablon, c’est la force de ses propos en si peu de pages. Son récit est puissant, noir, réaliste, et on se dit qu’il doit sacrément observer notre société malade pour la décrypter aussi finement.

C’est un recueil qui se lit vite, on y découvre des tranches de vie, des gens atypiques aux décisions soudaines ou réfléchies. C’est noir, mais il y a de l’espoir, pas beaucoup, juste une petite lumière au bout du tunnel dans les dernières pages et c’est suffisant pour se dire que, peut-être, tout n’est pas perdu, qu’on peut encore croire en l’homme ou …… en la femme ;- )

Éditions : Jigal (15 Septembre 2020)
ISBN : 978-2377221066
178 pages

Quatrième de couverture

Paris. Un immeuble ancien avec une cour pavée. Cinq étages. Fin de semaine calme. Si ce n’est que… Que la grosse fête au quatrième chez ces trentenaires bien dans leur époque tourne mal. Qu’au premier, un des deux Lettons de passage dans la capitale a pris un éclat de grenade GLI-F4 dans le dos et saigne comme un bœuf. Que l’homme du deuxième qui a accueilli une sans-papiers ne rêve que de la baiser…. Etc….