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07/04/2011

Entretien avec Patrick S. Vast à propos de "Béthune, 2 minutes d'arrêt"

 Un entretien de Patrick S. Vast avec Cassiopée sur Bétune, 2 minutes d'arrêt.

Cassiopée.  Pouvez-vous vous présenter en cinq mots (adjectifs, noms ou verbes) ?

 

Patrick  S. Vast. Bonjour, très heureux de participer à votre questionnaire, mais on ne commence pas par le plus facile. Alors je dirais : enthousiaste, opiniâtre, perfectionniste, anxieux (l’un découlant de l’autre), et sans doute un peu chiant (l’un découlant également de l’autre).

 

C.     Votre roman se passe à Béthune, ville où vous habitez depuis quatorze ans, est ce pour vous un moyen de faire connaître ce lieu, de lui rendre « hommage » ?

 

P.S.V. À la différence de mon premier polar, « La veuve de Béthune » qui se déroulait à 95% à Béthune, « Béthune, 2 minutes d’arrêt », se déroule également à Lens et à Dunkerque. Mais il est question également de Béthune, car je trouve à cette ville un côté « simenonien », un côté décor naturel de polar, avec en plus un potentiel cinématographique. Sa place pavée, son beffroi, son église à tour carrée, ses petites rues, son canal… tout cela tisse une bonne ambiance polardeuse et crèverait l’écran. C’est donc avant tout pour ce qui émane de la ville que je l’ai choisie par deux fois déjà, et aussi pour la faire connaître un peu mieux. Un hommage ? Je ne puis que le lui rendre, dans la mesure où je n’oublie pas que mon premier roman publié comporte Béthune dans le titre. C’est un juste retour des choses, un acte de reconnaissance.

 

C.      Vous dites écrire des « romans du quotidien parlant de la vie de tous les jours », est ce que cela vous semble plus difficile à réaliser qu’un livre d’horreur ou de fantasy ? La vraie vie est elle plus ardue à dépeindre ?

 

P.S.V.  Ce sont deux démarches différentes. Dans le fantastique on peut se lâcher. On nage dans l’irrationnel, tout est permis ou presque. Dans le polar, et surtout dans le type de polar que j’ai choisi, c’est différent. Il faut être en parfaite adéquation avec le quotidien, on se situe dans le réalisme. Mais comme beaucoup, je suis pétri de rencontres, d’expériences, de scènes de la vie.  Alors quand j’écris mes polars, je laisse décanter tout ce que j’ai amassé au fil des années, afin de produire des situations réalistes où évoluent des personnages sonnant vrais, qui ne seraient pas que des personnages de papier. Je ne dirais pas que la vraie vie est plus difficile à dépeindre, il faut laisser se déverser son vécu, en tirer un maximum profit.

 

 

C.      Depuis quand écrivez vous, à quel rythme, pourquoi, pour qui ?

 

 

P.S.V.   J’écris depuis l’âge de 12 ans. D’abord des petites histoires sur des cahiers d’écolier, puis vers 15/16 ans, des poèmes fortement inspirés de Jacques Prévert, ensuite des chanson, et enfin des manuscrits envoyés durant des années avec plein de refus. À l’époque où je n’étais pas publié, ma production était variable. Depuis que je suis publié, j’écris deux romans par an, je pourrais aller jusqu’à 3 ou 4, mais le problème c’est que tout ne peut pas être publié dans une seule année. Alors maintenant, je propose deux manuscrits. Ça a été le cas avec « Béthune, 2 minutes d’arrêt ». J’avais envoyé un premier manuscrit avant celui-ci, et c’est le second qui a été jugé le meilleur. Je refais la même chose cette année. J’ai envoyé un manuscrit fin janvier et j’ai commencé un nouveau polar la semaine dernière qui sera envoyé vers le mois de juin.

     J’écris pour le plaisir de raconter des histoires. Je suis assez nostalgique de l’époque des feuilletonistes, qui publiaient une page chaque jour dans un journal. Je serais tenté de dire que j’écris d’abord pour moi, en tout cas, j’écris l’histoire que j’ai envie de lire. Mais c’est passager, j’écris surtout pour toutes celles et tous ceux qui aiment les intrigues, les romans qui les déconnectent bien du présent.

 

C.      Ecrivez vous toujours de livres « courts », pourquoi ?

 

P.S.V.    Je dirais plutôt que j’écris des livres pas trop longs. Dans le polar, il existe différentes démarches. Certains auteurs profitent du polar pour se lancer dans des digressions, faire part de leur point de vue sur des faits de société, livrer leurs opinions politiques et bien d’autres choses encore. D’autres sont très longs et minutieux dans les descriptions. D’autres encore, greffent sur leur histoire principale, des histoires ou éléments périphériques. Tout cela rallonge les romans et on peut même arriver à de véritables pavés. Pour ma part, j’aime écrire des polars où le suspense domine. Pour moi il faut une bonne intrigue qui doit emmener le lecteur dès les premières lignes et faire en sorte qu’il ne lâche plus prise. Dans ce genre de démarche, les digressions, les longueurs, tout ce qui peut détourner de l’intrigue, n’est pas de bon aloi. En même temps, trop de suspense tuant le suspense, un suspense trop long peut faire décrocher le lecteur. Il faut savoir le faire « atterrir » au bon moment. Et donc on en arrive à des romans courts, en tout cas pas trop longs. C’était la démarche de mes maîtres à penser : Louis C. Thomas, Michel Lebrun, Georges J. Arnaud, William Irish, Fredric Brown, Chase, ou encore Simenon et Frédéric Dard pour tout ce qu’il a écrit sous son propre nom.

 

 

C.       Pensez vous que la violence puisse agir comme une drogue et entraîner l’homme (au sens de l’être humain) à être toujours plus violent pour avoir des sensations ? D’après vous la violence est elle banalisée par les médias ?

 

 

P.S.V.    Dans « Béthune, 2 minutes d’arrêt », Marc Jamet est un personnage perturbé qui a été confronté à la violence dans son enfance. Au départ il cherche son adrénaline dans le fait d’inquiéter, d’intriguer. La violence va surgir du fin fond de son être au fil des événements. Mais il est vrai que celle-ci gagne en force au fur et à mesure, on peut parler d’une certaine addiction de sa part. Dans le cas des tueurs en série, on peut parler d’une certaine défonce à la violence, d’un effet d’euphorie morbide et destructrice. La violence n’est pas banalisée par les médias qui ne font que la montrer, elle se banalise d’elle-même par sa présence de plus en plus accrue, son développement et surtout son absurdité. Je suis de la génération dite « peace and love », l’époque de Woodstock (3 jours de paix, d’amour et de musique). Je me sens en décalage complet par rapport à des meurtres pour 20 € ou des histoires de territoire. Dans les années 70, on regardait « Orange mécanique » au cinéma. Pour nous c’était de la science-fiction, maintenant c’est du quotidien.

 

C.     Pour votre roman "Béthune, 2 minutes d'arrêt", vous êtes vous inspiré d'un fait divers existant? Est ce que lire l'actualité peut vous aider à démarrer un nouveau livre?

 

P.S.V.    Non, « Béthune, 2 minutes d’arrêt » n’est absolument pas inspiré d’un fait divers. C’est une histoire entièrement imaginée. En partant d’un acte banal (l’oubli d’un sac à main dans un train), réussir à tisser une intrigue où le suspense prévaut, était pour moi une démarche très excitante. Quand j’habitais en région parisienne, j’avais écrit deux ou trois chapitres d’une première mouture. Dans cette version, la jeune femme oubliait son sac dans le métro. Mais j’ai été beaucoup plus à l’aise de l’écrire avec une action se déroulant entre Lens, Béthune et Dunkerque. Comme quoi le Nord est bien une terre de polars : Polars en Nord, pour adresser un clin d’œil à mon éditeur. Pour les polars, je ne me reporte pas à l’actualité. Je laisse libre cours à l’imagination. Par contre je pense que les histoires que l’on trouve dans mes polars pourraient bien faire la Une de l’actualité. Il en est autrement de mes nouvelles de science-fiction (en lecture libre parmi d’autres sur mon blog chez hautetfort). Là, l’actualité m’a inspiré plus d’une fois.