17/02/2012
Nécropolis, de Herbert Lieberman
Une chronique d’Astrid
« Le psychiatre sait tout et ne fait rien.
Le chirurgien ne sait rien et fait tout.
Le médecin légiste sait tout mais un jour trop tard ». (Vieil adage)
Eté 2011, la chaleur est au rendez-vous, la langueur des terrasses m’invite à la lecture. Je découvre un nouvel auteur de roman noir, de thrillers poisseux ; genre que j’affectionne de longue date. Est-ce grave docteur ? Qu’importe, je me plonge dans NECROPOLIS et sa noirceur urbaine. Qu’importe, mes yeux découvrent l’histoire du Docteur Paul KONIG, médecin légiste en chef de la Big Apple des seventies, celle attaquée de parasites. Impossible de se rafraichir, je vais devoir suer sang et eau.
Pas de déception dans le ciel des pages. Immersion garantie dans un New-York à la Fritz Lang. Immersion dans une métropole vaniteuse, shootée, corrompue de bassesses politiques ; une métropole qui colle à votre épiderme comme une maladie de peau qu’on finit par accepter.
Paul KONIG notre héros - et quel héros - dissèque, autopsie, analyse, découpe les viscères ; son œil sait les malédictions qui font nos corps humains. PAUL KONIG vit seul, hanté par le souvenir d’une épouse disparue, portant la culpabilité de ceux que la passion de leur métier dévore au point d’en oublier les autres rôles de leur vie. Paul KONIG a une fille, Lolly, peintre sensible et délicate. Elle disparait sans préavis, sans mots ni raison. S’ensuivent : une filature rythmée par les errances nocturnes, une quête éperdue dans une ville où le pardon n’existe plus.
Personnage de père fou d’un amour jamais prononcé pour sa fille, KONIG nous immerge dans les affres de ses blessures personnelles, de celles qui ne cicatrisent pas. Tel un Atride sorti d’une tragédie antique il ira jusqu’au bout de la déraison. Ses pas d’ogre au grand cœur le mèneront dans les endroits les plus lugubres, ceux d’avant le grand nettoyage qui redonnera à la ville une image politiquement acceptable. Fou de chagrin, le verre de whisky dans la main gauche, la cigarette dans la main droite, KONIG ne cesse tout au long des 600 pages du roman de passer au scalpel nos esprits et nos corps jusqu’à l’issue finale : chant du cygne shakespearien qu’on imagine aisément filmé par un Coppola.
Œuvre cinégénique, réflexion sociologique, style sec et précis nimbé d’envolées poétiques, NECROPOLIS de Herbert LIEBERMANN est un très grand roman noir, un roman fondateur, un voyage au bout de la nuit made in USA qui remporta plusieurs récompenses littéraires. A lire plutôt en hiver.
Titre : Nécropolis
Auteur : Herbert Lieberman
Nombre de pages : 600
Traduit de l’américain par : Maurice Rambaud
Editeur : Editions du Seuil, 1977
Présentation de l’éditeur :
Nécropolis, c’est la « Cité des morts » : New York, sillonnée par les fous et les drogués, les assassins et les paumés de toute sorte ; en proie aux intrigues de la municipalité et aux trafics d’influence ; quadrillée par les voitures de police et les ambulances, avec, comme destination finale, presque toujours : la morgue.
Un des sommets de la littérature policière, mais aussi un extraordinaire document pour lequel l’auteur a lui-même enquêté pendant plus d’un an dans les morgues de Manhattan. Surtout peut-être comme la presse américaine l’avait souligné lors de la parution, « le plus beau livre jamais écrit sur New York ».
Grand prix de la littérature policière 1978.
06:07 Publié dans 02. polars anglo-saxons | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook | |