23/12/2011
Opération Champagne, de Jean-Paul Fosset
Une chronique d'oncle Paul
Une jeune fille, appelons-la Hermine, de bonne naissance, s’enfuit de chez son père, une cassette à la main et s’engouffre dans un café, le Valentino, à Troyes. Elle rejoint un inconnu, appelons-le X ou encore Geiger, en provenance de Paris, et qui apparemment n’effectue pas ses déplacements sans but. Ce pourrait être un pan de la vérité, de ce qui s’est réellement déroulé, du moins selon les déclarations de quelques témoins. Peut-être ceci ne s’est pas passé tout à fait de cette façon, mais dans le doute gardons cette version pour confirmée à défaut d’être authentique et certifiée. Cette jeune femme est habillée d’une robe rouge. X, ou Geiger, est connu des services de police comme un personnage évoluant pour le compte d’un service de l’état sans que son appartenance à telle ou telle administration plus ou moins secrète soit avérée. Tout ce que l’on sait, c’est que X, appelons-le définitivement Geiger, se déplace en Jaguar et qu’il est vêtu d’un costume de marque, sous lequel est dissimulé une arme à feu extra-plate. Une supposition du commissaire d’Artagnac, lequel se trompe rarement, ou peu souvent.
Le commissaire d’Artagnac, et ses hommes, sont chargés de résoudre l’énigme de la disparition d’Hermine, à moins qu’il s’agisse d’un enlèvement. Pourtant les forces de l’ordre ont d’autres chats à fouetter, ayant été réquisitionnées pour une toute autre mission. Le président a gagné précipitamment la résidence du fort de Brégançon, oubliant d’avertir le principal intéressé dans ce départ précipité, son premier ministre.
Donc Hermine, qui a suivi volontairement ou non Geiger, possède un petit coffre qu’elle garde précieusement par devers elle. Et Geiger est intrigué par le contenu de cette cassette. Ou, au contraire, il sait pertinemment ce qui se dissimule à l’intérieur et dans ce cas le voyage entrepris en compagnie d’Hermine équivaudrait à un impératif. Et cette robe rouge portée par Hermine est tout aussi énigmatique, se rétrécissant, collant à la peau en certaines circonstances, et constitue un véritable mystère pour d’Artagnac et les différents protagonistes auxquels il a recours. La robe ne serait pas rouge mais blanche ou écrue, ou si elle est rouge elle ne serait pas teintée naturellement.
D’Artagnac rencontre des conservateurs d’archives, des responsables de bibliothèque, des érudits et emmagasine livres et archives qu’il dépouille avec voracité, fébrilité et impatience dans son bureau. Même ses adjoints sont attelés à cette tâche.
Cette cassette en argent finement ciselé est apparue pour la première fois, pour ce que les écrits en révèlent, en l’an 407, en possession d’un chef Vandale qui dressé sur son cheval s’oppose à Nicaise l’évêque de Reims. Lors de cette confrontation le Vandale décolle la tête de Nicaise, mais celui-ci n’en perd pas la tête pour autant, métaphoriquement parlant, et continue à avancer et parler comme si de rien n’était. En d’autres circonstances historiques elle resurgit lors d’événements importants et sanglants. Une cassette liée à des troubles situés à Bar-sur-Seine, Troyes ou Chalons. Principalement les guerres de religion entre catholiques et réformés ou huguenots, mais aussi en d’autres circonstances, liées à des crimes de sang et des massacres.
Cette intrigue en forme de trompe-l’œil même habilement récit historique, ésotérisme et fantastique. Le lecteur est un spectateur assistant à une mise en scène qui relèverait de la magie : des personnages face à un miroir dans lequel se reflèteraient leurs images avec l’impression de ne plus pouvoir distinguer de quel côté de la glace se situent les vrais de leur représentation.
Un roman insolite, baroque, déstructuré, hypnotique et magnétique. Entre histoire d’hier et d’aujourd’hui, le lien est ténu, comme sur le fil du rasoir, ou d’un couteau.
Jean-Paul FOSSET
Opération Champagne.
Collection Polars en Nord n°96. E
ditions Ravet-Anceau.
192 pages. 9€.
09:01 Publié dans 01. polars francophones | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook | |
Les commentaires sont fermés.