01/09/2012
Poussière tu seras, de Sam Millar
Une chronique de Catherine/Velda.
Avec Sam Millar, une seule certitude : Poussière tu seras...
Sam Millar n'est pas exactement un auteur comme les autres. Ancien activiste de l'IRA, il a passé de nombreuses années en prison dans des conditions particulièrement dures - torture, privations, isolement... Des années qui ont laissé sur l'homme et sur l'auteur des traces profondes et indélébiles. Il n'est pas inutile de le savoir avant de commencer la lecture de Poussière tu seras, son premier roman paru en français. Une lecture qui n'est pas de tout repos, je vous le garantis...
Le jeune Adrian, fils de l'ancien flic Jack Calvert, se balade aux environs de Belfast, un matin d'hiver, quand il découvre un os qui ressemble fort à un reste humain... Intrigué, il rapporte chez lui son trophée qu'il cache dans sa chambre. Adrian et Jack forment un drôle de couple, surtout depuis que la mère d'Adrian est morte, renversée par un chauffard. Jack partage son temps entre la compagnie de ses ex-collègues, sa bouteille de whisky et le lit de Sarah, la galeriste qui l'encourage dans sa nouvelle activité, la peinture. C'est dire qu'il ne lui reste plus beaucoup plus de temps à consacrer à son fils. Pas très loin de là, nous allons faire la connaissance d'un autre drôle de couple, les barbiers Jeremiah et Joe, deux personnages qui paraissent surgis du passé... Joe est veuf, Jeremiah vit avec Judith une effroyable relation sado-masochiste sur fond de drogues dures et de violence extrême. Pendant ce temps-là, la police est occupée à réveiller une affaire à-demi enterrée, celle de la disparition d'une petite fille, Nancy. L'os trouvé par Adrian appartiendrait-il au corps de cette petite? Voilà, les principaux personnages ont pris place sur l'échiquier. Et Sam Millar s'y entend pour leur donner vie, et les entraîner dans une effroyable histoire qui prend racine bien des années auparavant, dans un orphelinat religieux.
La noirceur est présente à tous les instants, la peur aussi. Dans les premières pages, on ne sait pas très bien de quoi on a peur. Mais Millar sait instiller dans ses mots une sensation de malaise, voire d'épouvante qui évoque un Edgar Poe moderne. La première scène du roman, où l'on fait la connaissance d'Adrian, est particulièrement virtuose : Adrian fait l'école buissonnière, mais ça n'est pas pour s'amuser avec ses copains... Il se promène dans la campagne, au milieu des arbres ployant sous la neige, quand il fait sa macabre trouvaille. Et sa rencontre à la fois compassionnelle et violente avec un corbeau blessé nous confirme au bout de quelques pages que nous venons de pénétrer dans un territoire interdit... Ce livre dur ne nous épargne jamais, Millar ne fait pas de concessions. La mort, l'enfance violée, la perversion, la mémoire et le mensonge : dans Poussière tu seras, si l'intrigue, basée sur un fait réel qui a marqué l'histoire de l'Irlande, est passionnante, ce sont néanmoins l'émotion et la puissance des mots qui l'emportent, avec des scènes particulièrement éprouvantes, sans aucune complaisance, qui atteignent leur cible en plein cœur.
Pour finir, un clin d’œil en forme de merci à Caroline Vallat et au Concierge masqué, qui m'ont fait découvrir Sam Millar.
Catherine/Velda (le blog du polar)
Poussière tu seras
Sam Millar
traduit de l'anglais par Patrick Raynal,
Fayard noir
15:15 Publié dans 02. polars anglo-saxons | Lien permanent | Commentaires (1) | Facebook | |
Commentaires
Bonjour Catherine,
Après avoir lu cette très bonne chronique, voilà que Sam Millar me paraît soudain incontournable. Un grand merci pour cette future découverte. Amitiés. Jean.
Écrit par : dewilde | 02/09/2012
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