22/12/2019
L’œil était dans l'arbre, de Michel Picard
Une chronique de Cassiopée
Michel Picard est scénariste, il écrit pour des téléfilms, des séries, des dessins animés. Il réalise également des documentaires animaliers et des fictions. Dans son roman, qui est qualifié de thriller « familial et bestial », il mêle tout cela, il se « lâche » et dévoile sa « part d’ombre ».
Au départ, on se retrouve avec un jeune homme qui enterre un cadavre, on ne sait rien ni de l’un ni de l’autre, ni des circonstances qui les ont amenés là tous les deux. Au fil des pages, on va cerner leur histoire, oscillant de chapitre en chapitre entre « le jour d’avant… et « le jour d’après… » qui représente le présent. Les découvertes vont être nombreuses et denses en informations. L’auteur intègre dans son récit beaucoup de dialogues très fournis et de scènes désopilantes. Quant aux personnages, ils sont souvent fourbes et pas du tout aussi lisses qu’ils voudraient nous le faire croire. Pratiquement tous ont une « déviance » … et c’est assez jouissif dans les premiers chapitres d’essayer de deviner le côté malhonnête de chacun. Comme ils mentent, trichent, il est délicat de savoir ce qui est vrai ou faux dans les discussions. Le lecteur se trouve entraînée dans un contexte rempli d’animaux vivants ou empaillés qui ont joué ou vont jouer un rôle dans l’intrigue. C’est complètement loufoque, de temps à autre un tantinet délirant. Les scènes sont décrites de façon très visuelle et on sent que Michel Picard est un habitué du monde du cinéma. On a presque l’impression d’avoir l’œil collé à la caméra et de suivre un travelling. C’est un procédé d’écriture original avec des phrases courtes, percutantes, qui peuvent paraître même déroutantes de temps à autre.
L’ensemble du récit est assez complexe, pas forcément compliqué mais il est nécessaire de ne pas perdre le fil. Non pas qu’il y ait pléthore de protagonistes mais les allers retours présent passé sont nombreux, apportant chaque fois un éclairage supplémentaire soit sur les individus soit sur les faits eux-mêmes. Il faut donc être hyper attentifs pour ne pas perdre un indice ou une information importante.
C’est sans doute pour toutes ces raisons que j’ai eu quelques difficultés à entrer dans cette histoire. Au départ, je trouvais que ce n’était pas assez cartésien. Puis je me suis intéressée petit à petit à cet univers en marge, à ces personnes totalement imprévisibles, à ce style pas si décousu qu’on le pense au premier abord. J’ai pu alors prendre du plaisir à cette lecture. Le recueil est foisonnant et Michel Picard, sous des aspects loufoques, dénonce pas mal de dérives notamment par rapport au monde animal mais pas seulement… Les lobbies influenceurs sont eux aussi écorchés … Les expériences médicales sont évoquées ….
Au final, c’est un livre surprenant, de temps en temps dérangeant, qui risque de peiner à trouver son public. Mais lorsque ce sera fait, nul doute que celui-ci, intrigué en premier lieu, ne tardera pas à être conquis, puis un tantinet effrayé par les perspectives présentées… avant de se souvenir que tout ceci n’est que de la fiction et que toute ressemblance avec des personnes existant ou ayant existé n'est que pure coïncidence ….. Enfin, ça c’est ce qu’on dit ….
Éditions : L'Harmattan (4 Juillet 2019)
460 pages
Quatrième de couverture
Alors qu'il ensevelit un cadavre dans une caverne forestière de l'Ouest parisien, Adrien, presque dix-huit ans, a bien du mal à se remettre du cataclysmique règlement de comptes familial auquel il vient de survivre, notamment grâce à l'intervention déterminante d'animaux, face aux personnes qui les exploitaient. La veille, sa mère, productrice d'une émission télévisée, et son père, chirurgien esthétique, avaient dû répondre de leurs perversités commises depuis leur rencontre quasi-initiatique devant Le Cavalier de l'Apocalypse, un des Écorchés de Fragonard. Une autopsie à vif de la vie éminemment déviante de ses parents, menée par des inquisiteurs particulièrement vindicatifs...
16:43 Publié dans 01. polars francophones | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook | |
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