19/12/2012
La vengeance du loup, de Jacques Mazeau
Une chronique d'oncle Paul.
Noël, acte 2 !
En cette avant-veille de Noël 2002, le brave Eugène, cantonnier de son état ou plutôt, comme il est de bon de s’exprimer ainsi de nos jours, agent territorial, effectue sa ronde quotidienne et vespérale au cimetière de Mende. Il est tout ébaubi d’entendre et de voir derrière le petit enclos qui protège la sépulture des Lefort, Eugène et sa femme s’invectiver et se taper dessus comme deux pochards.
La dalle a été déplacée. Pourtant Edmond Lefort, le notaire de Mende, est décédé depuis cinq ans et son épouse l’avait précédé onze ans auparavant. Que fait-on dans ces cas là ? On s’évanouit tout simplement. Sa déposition auprès de la gendarmerie est mise en doute, mais le déplacement d’une dalle de plusieurs centaines de kilos nécessite l’emploi d’un engin de terrassier. Dubitatif, le commandant Moreau fait appel à Muriel Lacan qui travaille à l’unité de recherche en parapsychologie de Toulouse et a effectué ses armes à Quantico aux Etats-Unis.
Muriel est une spécialiste de ce genre d’événements qui dépassent l’entendement. Elle en profite pour demander à son ami Michel Fabre, chargé des affaires spéciales à la P.J. parisienne, de la rejoindre. Comme celui-ci n’attendait que son appel, ne sachant que faire durant ses vacances, il accepte et s’empresse de la rejoindre. Le lendemain de leur arrivée leur première tâche consiste à s’intéresser au témoignage d’Eugène et d’aller rencontrer le cantonnier chez lui. L’homme narre ce qu’il a vu, en présence de sa femme Mélanie, une femme acariâtre qui minimise ses explications.
Muriel et Michel sont persuadés que l’homme n’a pas tout dit, qu’il a caché volontairement des informations sous la pression de son épouse revêche. Pourtant ils en savent un peu plus sur les époux Lefort et leur descendance. Le notaire courrait volontiers le guilledou et est décédé d’une chute d’escabeau en voulant compulser un livre dans sa bibliothèque. Un trépas étonnant conclu comme un banal accident. Sa femme Lucienne décédée d’une mystérieuse maladie onze ans avant lui possédait sa propre vie, ne s’intéressant aucunement à sa famille. Les deux frères, Hubert devenu entrepreneur de travaux publics et Hervé avocat, ainsi que Fabienne qui a été déshéritée parce qu’elle a eu un enfant hors mariage, Hugo. Or elle a toujours refusé de dévoiler le nom du père, même à son fils. Ce qu’il lui reproche depuis des années, et de plus en plus souvent depuis quelques mois.
Ce que nos enquêteurs ne savent pas encore mais dénicheront peu à peu, c’est que Fabienne se rend plusieurs fois par semaine en catimini chez le docteur Merlieux, psychanalyste plus âgé qu’elle de plus de vingt ans et adepte des sciences occultes. Il est le père d’Hugo mais a toujours refusé que Fabienne dévoile son identité. Yvonne Châtelet, une vieille dame qui consulte régulièrement Merlieux voit son sommeil perturbé par la présence dérangeante de Lucienne. Elle se confie au Père Tallec qui est lui aussi mis en présence de forces surnaturelles. Tout se précipite lorsqu’Eugène est retrouvé dans le cimetière, près du monument funéraire des Lefort, égorgé. Or les premières constatations indiquent que, s’il s’agit d’une bête, ce ne peut être un chien. Mais d’autres personnes vaquant de nuit pour diverses raisons qui leur sont propres, aperçoivent un animal qui ressemble à un chien mais n’en est pas un. Muriel et Michel, qui n’osent s’avouer qu’ils s’aiment, par pudeur et par appréhension, s’ils trouvent en Moreau un allié, sont convaincus que lui aussi ne leur dit pas tout et qu’il ne délivre ses informations qu’à petites doses et avec réticence.
Jacques Mazeau, dans ce thriller fantastique, nous plonge au cœur du terroir français, celui de l’ésotérisme et des sortilèges, ce que certains dénomment superstition. Le surnaturel est présent mais ce n’est que l’un des éléments du récit qui tourne autour de l’histoire d’une famille de notables qui possède bien des secrets inavouables. Et il ne faut pas croire que le fantastique n’est qu’affabulation car de nos jours tout un chacun y est confronté, ne serait-ce que par les petits placards publicitaires dans les journaux gratuits dédiés aux annonces.
Magnétiseurs, radiesthésistes, devins, et autres charlatans pour les uns, personnes douées d’un sixième sens pour les autres, sont souvent consultés et pas uniquement par des individus naïfs. Et il faut savoir que chaque évêché ou presque possède son prêtre exorciste. Quant au thème de la lycanthropie il a été maintes fois décliné, mais ici ne sert qu’à ajouter un frisson supplémentaire à une intrigue fort bien construite et … envoûtante.
Les éditions De Borée prévoient de rééditer ce roman dans leur collection poche en février 2013
Paul (Les lectures de l'oncle Paul)
La vengeance du loup
Jacques MAZEAU
Editions du Masque.
Février 2011. 17,30€
15:53 Publié dans 01. polars francophones | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook | |