05/05/2011
Le léopard, de Jo Nesbo (chronique 1)
Une chronique de Richard
C’est avec les biceps endoloris (761 pages) et une boulimie littéraire comblée que je vous recommande ce roman qu’il faut lire sans faute.
Vous voulez savoir ce qu’est un véritable «tourne-pages», un thriller prenant, captivant, une histoire superbement racontée avec des rebondissements étonnants? Jo Nesbo vient d’écrire un classique, un roman qui pourrait faire école sur l’art de prendre un lecteur, de le manipuler, de l’intéresser, de lui faire croire que le roman est terminé quand il reste encore 160 pages et le retourner comme une crêpe, dans une enquête qui rebondit à chaque chapitre.
J’aimais bien Jo Nesbo avant ma lecture de ce dernier pavé; maintenant, je l’adore! L’auteur maitrise parfaitement toutes les ficelles de son écriture tel un Machiavel de l’intrigue touffue, complexe, mais parfaitement abordable. Bonus suprême, son Harry Hole, policier atypique, humain, dépravé, solitaire et amoureux, se complaisant dans la boisson et l’opium est un personnage extraordinaire: impossible de ne pas l’aimer car chacun de ses défauts, chacune de ses qualités nous rapproche de notre propre humanité.
Et c’est ainsi que la belle Kaja Solness le retrouve à Hong Kong: déchet humain, alcoolique, drogué et poursuivi par les Triades. Elle doit le convaincre de revenir en Norvège pour rechercher un tueur en série qui utilise un instrument diabolique et terrifiant. Dès le premier chapitre, le lecteur découvrira cette invention monstrueuse dans une scène absolument effrayante, des images de terreur et la gamme d’émotions vécues par la victime.
À partir de ce premier chapitre, tout l’art de Jo Nesbo nous accroche pour nous faire vivre un grand moment de lecture. Vous voulez les ingrédients ? Les voici :
•un policier marqué, déchiré, hanté par ses démons du passé et l’absence des êtres aimés;
•de multiples suspects mais un tueur diabolique, intelligent, retors;
•une guerre sans pitié entre différents services de police;
•une galerie de personnages secondaires pertinents et bien définis;
•des histoires d’amour;
•des incursions dans le grand Nord de la Norvège ou près des volcans en éruption du Congo;
•un père malade, une souffrance intenable et un dilemme moral;
•de l’action, des rebondissements, des scènes angoissantes sans nommer les personnages (exercice très difficile à réussir ...), des fausses pistes, des faux suspects, une intrigue superbement ficelée et un dénouement à plusieurs étapes ... !;
• des dialogues savoureux.
Facile de tout mettre cela dans un même livre? Beaucoup plus difficile de rendre la recette crédible, de faire en sorte qu’à chaque page, le lecteur y croit.
Et on en redemande.
Le talent de Jo Nesbo est indéniable ! Les 761 pages de ce roman sont nécessaires: pas une ligne de trop, pas un instant d’ennui; l’intérêt est soutenu, parfois même amplifié par l’imagination débordante de l’auteur. Jo Nesbo est capable de nous surprendre, de nous mettre sur de fausses pistes, de jouer avec notre intelligence de lecteur de polars et de nous manipuler, de nous faire croire ce qu’il veut bien nous révéler pour ensuite nous amener vers le contraire ou l’inattendu. Du bonbon !!!
Et nous tournons les pages tellement vite ... que l’effet d’aspiration (et oui, comme en Formule 1 ...) allège le poids du livre !!!
Vous êtes amateurs de Jo Nesbo et de Harry Hole, vous avez lu quelques romans avec ce personnage, lancez-vous sans attendre dans la lecture de cette brique.
Vous ne connaissez pas Harry Hole et aimeriez le découvrir? Et bien je vous conseille de suivre l’évolution de ce personnage à travers les quelques romans écrits par le moins nordique des auteurs scandinaves.
Trop pressé pour attendre? Alors, vous pourrez apprécier la lecture de «Le léopard» comme entrée en matière dans l’imaginaire de Nesbo. Cependant je vous conseillerais quand même de lire «Le bonhomme de neige», un préalable non essentiel mais quand même utile et aussi, «Le rouge-gorge», un des meilleurs de la série.
Quelques extraits, juste pour le plaisir de les relire ...
«Tuer, en fin de compte, ce n’est qu’anticiper l’inévitable. La mort ne fait aucune exception et c’est bien, car la vie n’est que douleur et souffrance. De ce point de vue, tout meurtre est un acte de miséricorde.»
«Les arbres sur la rive faisaient penser à des témoins silencieux et tristes, les épaules tombantes.»
«C’est à moi que tu rends compte, et j’aime bien être tenu au courant, c’est tout.
Je rends compte qu’il n’y a aucun compte à rendre, chef.»
«Et il était ivre. De nouveau ivre. Ivre de Jim Beam, ivre de méchanceté, de lui-même, de merde.»
«Il était surtout question de sport, de célébrités et de catastrophes naturelles. Et de quelques hommes politiques à classer dans les deux dernières catégories.»
Bonne lecture !
Richard, Polar Noir et blanc : http://lecturederichard.over-blog.com/
Vous pouvez lire ici une autre critique, par Christine, du roman de Jo Nesbo Le léopard
Présentation de l'éditeur
Deux femmes sont retrouvées mortes à Oslo, toutes les deux noyées dans leur sang. La police, en pleine guerre inter-services, se retrouve face à un mystère, puisque les blessures à l’origine des hémorragies fatales semblent avoir été provoquées de l’intérieur. La belle Kaja Solness, de la brigade criminelle, est envoyée à Hong Kong pour retrouver le seul spécialiste norvégien en matière de tueurs en série. Le policier alcoolique s’est caché dans une ville d’un million d’habitants pour fuir les démons assoiffés de sang d’anciennes affaires, les souvenirs amers de la femme qu’il aime ainsi que les membres des triades à qui il doit de l’argent. Ce flic s’appelle Harry Hole… Pour la huitième affaire de son enquêteur fétiche, Harry Hole le détective au grand coeur et à la gueule cassée, Jo Nesbo nous livre son roman le plus complexe et le plus maîtrisé. Le léopard est une traque sans pitié qui laisse le lecteur pantelant. Nous promenant des pics enneigés de la Norvège aux volcans sulfureux du Congo, rien ne nous est épargné : avalanches mortelles, volcan en éruption, tueur en série à faire frémir, guerre des polices et manipulations en tout genre, sans oublier une histoire d’amour en arrière-plan pour offrir des moments de respiration au coeur de cette tornade d’action aux reflets d’hémoglobine. Nesbo mène son récit tambour battant, comme au volant d’un bolide lancé à tombeau ouvert jusqu’à la dernière page. Un thriller magistral.
Le léopard
Jo Nesbo
Série noire Gallimard
2011
761 pages
21 €
Le site de l’auteur: http://jonesbo.com/
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