23/01/2019
Le pays des oubliés de Michael Farris Smith (The Fighter)
Une chronique de Cassiopée
Bouleversant …
Comme dans son roman précédent « Nulle part sur la terre », Michael Farris Smith donne la parole à ceux que l’Amérique oublie. Pas forcément des laissés pour compte, mais des hommes et des femmes malmenés par la vie, cabossés, secoués. Des personnes qui ne font pas toujours les bons choix mais qui sans arrêt se relèvent et essaient d’avancer…. Il parle d’eux avec une écriture qui irradie. Chaque mot, lourd de sens, parfois très sombre, scintille malgré tout car porté par un style qui magnifie le récit, qui lui donne vie malgré des faits graves, des histoires obscures. C’est poétique, plein de sensibilité, poignant.
« Juste ce sentiment d’être une âme singulière parmi les vivants infinis et les morts innombrables avec cette terre noire collée à la peau de nos pieds nus. »
Je remercie le traducteur, Fabrice Pointeau, qui a su trouver les termes les plus appropriés pour chaque phrase, gardant ainsi la force et la puissance du style de l’auteur.
Il s’appelle Jack, Jack Boucher, « un nom qui signifie quelque chose en français ». Abandonné à la naissance, il a été balloté de foyer en foyer puis Maryann l’a accueilli, recueilli, comme on prend sous son aile un animal blessé…. Elle l’a accepté comme il était. Il vivait avec la peur de se retrouver seul une fois encore puis ces deux-là se sont compris. Il a grandi. Une vie de combat, même si sa tutrice aurait souhaité autre chose pour lui. Il est maintenant blessé dans son corps et son esprit, et doit une énorme somme d’argent à Big Momma Sweet. C’est une femme qui ne lâchera rien et qui veut renter dans ses frais. Maryann elle, est arrivée au bout de sa vie et son esprit se perd. Jack veut lui donner une dernière fois l’image de « l’homme bien » qu’il est au plus profond (ou qu’il a essayé d’être ?) en payant sa dette et en gardant la maison et le terrain qu’elle lui a légués. Comment faire ? Comment cet homme usé a-t-il encore la force de chercher une solution ? Lui, qui est au bord du gouffre ne risque-t-il pas de prendre de mauvaises décisions ? Big Momma Sweet et ses hommes rodent, observent, soufflent le chaud et le froid…. Et lui se bât contre les autres, contre lui-même et surtout contre ses démons.
Le texte est tellement réaliste, fait de peu de mots que chaque chapitre vous frappe en plein cœur. On s’attache à Jack, malgré ses défauts, ses faiblesses. Son passé est si douloureux à porter. J’ai aimé les conversations qu’il a avec ceux qu’il rencontre, elles donnent de la profondeur et un autre éclairage aux événements. Cet homme est un battant, un combattant, un de ceux que vous n’oubliez pas une fois le livre refermé.
« Puis il prit une grande inspiration et ferma les yeux, et dans les cavernes de son esprit abîmé il chercha tous les fragments de haine et de ressentiment, et ces fragments avaient des bords tranchants. »
Lorsque je lis Michael Farris Smith, je suis complètement en osmose avec ce que je découvre. Je termine, presque épuisée, tant je suis en symbiose avec les personnages. J’ai fait connaissance avec Jack, je l’ai accompagné sur la route, j’ai souffert avec lui et je sais qu’il restera gravé en moi.
Traduit de l'anglais (États-Unis) par Fabrice Pointeau
Éditions : Sonatine (17 Janvier 2019)
Quatrième de couverture
Abandonné à la naissance, Jack est passé d'orphelinats en foyers, avant que Maryann le prenne sous son aile. Aujourd'hui celle-ci vit ses derniers jours et sa propriété est menacée par les banques. Jack, veut à tout prix conserver cet héritage, doit trouver l'argent nécessaire. Mais, le corps cassé par une vie de combats, il ne se sent plus la force d'avancer. Il doit aussi affronter Big Momma Sweet, qui règne sur cet empire du vice qu'est le delta du Mississippi.
15:28 Publié dans 02. polars anglo-saxons | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook | |
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