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21/02/2013

Froid mortel, de Johan Theorin (chronique 2)

froid_mortel.jpgUne chronique de Christine.

 Nous sommes en Suède. Jan Hauger, après avoir répondu à une petite annonce, est embauché en tant que professeur de maternelle. Ce n’est qu’un remplacement, un de plus sur son CV, mais ce jeune homme d’une trentaine d’années empoigne ses maigres possessions, donne son préavis et quitte son logement de Göteborg.

Direction : La Clairière, à Valla, une école maternelle qui ressemblerait à beaucoup d’autres, s’il n’y avait juste à côté l’hôpital Sainte‑Barbe.

Véritable forteresse, avec vidéosurveillance, clôtures électriques, gardiens partout, badges et codes d’accès, cet hôpital renferme les personnes les plus violentes, les plus dangereuses du pays. Certaines ont même défrayé les chroniques criminelles des dernières années.

Mais attention, ici on ne soigne pas, on « traite des personnes dysfonctionnelles ».

La Clairière a été créée tout spécialement pour accueillir les jeunes enfants de certains des patients, permettant à ces derniers de maintenir un lien affectif avec leur famille. Cela fait partie du traitement.

Entre la maternelle et l’hôpital, aucune communication possible en dehors d’un passage souterrain, un genre de sas, que les enfants empruntent pour rendre visite à leur parent interné. Et interdiction formelle au personnel de la Clairière de dépasser ce sas, le secteur de l’hôpital lui étant rigoureusement interdit.

Qu’est-ce qui a bien pu pousser Jan à postuler pour un emploi à cet endroit précis ? Malgré sa nature discrète, réservée, il pose bien des questions, s’intéresse d’un peu trop près à la topologie des lieux, et sa curiosité vis-à-vis de l’identité des résidents de l’hôpital n’est pas la bienvenue.

Quant aux collègues de travail, ils ne sont pas tous irréprochables non plus.

Chacun préoccupé par ses propres objectifs, tous contribueront à la mise en place d’un étau imparable.

Le destin est aveugle, surtout dans les lieux clos.

 Les récits entrecroisés de trois périodes différentes de la vie de Jan Hauger permettent progressivement de mieux le connaître et de découvrir, par petites touches au début, puis à un rythme allant crescendo, comment les évènements du passé vont mener au drame final.

 Délaissant les grands espaces battus par les vents, l’île d’Öland et ses ambiances de mystère et de légendes, Johan Theorin plonge cette fois son héros dans les entrailles sombres d’un hôpital, dans les méandres des couloirs, et si les sous-sols sont labyrinthiques, la psychologie des personnages ne l’est pas moins.

« Tout le monde a des secrets. »

 Avec un climat troublant, et un style certain, l’auteur réussit à nous faire ressentir de l’empathie pour un personnage peu charismatique au départ (de victime à héros, ou inversement, quelquefois seul le désespoir fait la différence), à faire surgir un élément final jusque-là peu développé sans qu’on y trouve rien à redire (mais après tout, connaissons-nous jamais totalement ce qui nous mènera à notre perte par surprise ?), voilà un roman qui allie une mise en place progressive des différents éléments et la mécanique implacable d’un thriller dans les derniers chapitres.

 Le lecteur, tout comme Jan Hauger, n’aura rien vu venir.

 Avec tous mes remerciements à Carol Menville et aux Éditions Albin Michel pour m’avoir permis de lire ce très bon roman qui devrait séduire les amateurs du genre en général, et de Johan Theorin en particulier !

 Christine, (Blog : Bibliofractale)

 Froid mortel
Johan Theorin
Editions Albin-Michel (1er février 2013)
400 pages; 21,50 €

 A lire sur le collectif un-polar :
- l'entretien avec Johan Theorin
des chroniques sur ses premiers romans :
- L'heure trouble, chroniqué par Liliba
-L'écho des morts, chroniqué par Paul et par Liliba
-Le sang des pierres, chroniqué par Albertine et par Christine