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17/01/2012

Entretien avec Jacques Expert

jacques_expert.jpg"J’ai vu beaucoup de choses, grâce à mon expérience de Grand Reporter, et peut-être que je supporte le malheur mieux que les autres. Je pense connaître le fond des individus", Jacques Expert

Grand Reporter à France Inter et à France Info durant quatorze ans, Jacques Expert couvre durant sa carrière un très grand nombre de faits divers. Son expérience l'a amené à se préoccuper du sort des femmes partageant leur vie avec des meurtriers ou des violeurs. Il publie un premier roman en 2007 intitulé "La femme du monstre", sur une femme dont on vient d'arrêter le mari meurtrier. 

Jacques Expert est aussi directeur des programmes de la chaîne Paris Première, qui appartient au groupe M6. (Source evene.fr)

Suite à la sortie de son dernier livre "Adieu", aux éditions Sonatine, Jacques Expert a accepté ce petit interview. Merci à lui...  Pascal Kneuss 

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Paco. Votre dernier roman, « Adieu », est sorti il y a maintenant quatre mois aux éditions Sonatine. Un bon sentiment ?

Jacques Expert. Franchement, oui. Non seulement il a été bien accueilli par la presse et les libraires, mais surtout par le public et les blogueurs dont vous faites partie. Entre parenthèse, vous avez bien saisi le ton de mon livre dans votre chronique.

Paco. Avant de parler de « Adieu », d’abord une ou deux questions sur l’auteur. Vous étiez il y a quelques temps Grand reporter, sauf erreur pour France inter et France info. Vous êtes à présent directeur des programmes de la chaîne privée Paris Première. Comment Jacques Expert, Le romancier, est né ?

Jacques Expert. Assez simplement. J’ai, par le passé écrit des essais. Il y a quatre ans, j’ai voulu écrire un document sur les femmes mariées avec « des monstres ». J’ai enquêté pendant cinq mois. A la fin, j’ai rassemblé mes témoignages pour en faire une histoire fictionnée. Depuis je préfère écrire des romans, et de loin. Quelle liberté !

Paco. Le fait d’avoir couvert de nombreux faits divers durant votre carrière, cela vous a-t-il dirigé, ou plutôt motivé à écrire des romans ? Sans faits divers, il n’y a pas d’histoire non ?

Jacques Expert. Oui, et comme on dit souvent : la réalité dépasse la fiction.

Paco. Votre premier roman « La femme du monstre », publié en 2007 aux éditions Anne Carrière, est la finalité d’un grand travail que vous avez fait sur les tueurs en série, les assassins, violeurs ou plutôt sur leurs femmes qui en connaissaient que la « belle » partie visible. Etes-vous fasciné par ce côté noir et sombre des gens ? Vous savez, cette face cachée que probablement chacun d’entre-nous semble dissimuler… 

Jacques Expert. Vous savez, personne n’est blanc, personne n’est totalement noir, même les pires d’entre nous.  Nous sommes tous gris, plus ou moins foncés. Moi, pour mes romans, j’aime bien les gris bien foncés !

Paco. Allez, « Adieu ». Euh non, je ne veux pas déjà mettre un terme à cet entretien ! Mais vous poser quelques questions sur votre dernier roman « Adieu ». Ce récit est dur au niveau moral. Pas mal de valeurs fondamentales essentielles pour un être humain sont mises à mal dans cette œuvre. Le lecteur n’en ressort pas indemne et finit profondément atteint. Une trame de fond remarquable. Justement, quels sont vos sources d’inspiration pour écrire ? Vous vous levez un matin avec une idée bien précise ? Ou alors c’est un long travail d’observations et de réflexions.

Jacques Expert. Dans tous mes romans (je le dois sans doute à mon passé de journaliste de terrain) l’observation est capitale car elle permet d’inscrire l’histoire dans le quotidien et de la rendre concernante. Mes « héros » peuvent être votre voisin.

Paco. Pour moi la qualité d’un roman se mesure particulièrement par la qualité des personnages. Comment sont nés ceux de votre roman ? Hervé Langelier semble si vivant… J’ai décelé une grande épaisseur, une profondeur remarquable pour plusieurs protagonistes de ce livre. Pas évident à transmettre au lecteur en plus… 

Jacques Expert. La réponse est difficile, j’essaie simplement d’être le plus proche d’une certaine réalité. J’ai vu beaucoup de choses, grâce à mon expérience de Grand Reporter, et peut-être que je supporte le malheur mieux que les autres. Je pense connaître le fond des individus.

Paco. Au fond de vous, quel ressenti avez-vous vis-à-vis de vos personnages ?

Jacques Expert. J’aime raconter des histoires. J’aime mes personnages comme des personnages, justement. Il faut bien les traiter !

Paco. Le commissaire Hervé Langelier, encore lui, vous le maltraitez sans ménagement… Vous aimez voir souffrir vos personnages ?

Jacques Expert. Pourquoi faire souffrir des personnages, ce n’est pas le propos. C’est une histoire que je raconte avec ses protagonistes. Point final ! Je ne suis pas sadique, quand même !

Paco. Ce qui m’a marqué, c’est que nous suivons la vie, l’histoire de personnages ordinaires, pas de super-héros, pas de superflics. Des personnes finalement « normales » qui sont confrontés à des problèmes auxquels ils doivent faire face, surtout au point de vue mental. C’est une chose que vous avez absolument voulu faire ressortir ?

Jacques Expert. Oui, je tiens absolument à ancrer mes histoires et mes personnages dans le quotidien. C’est dans ce genre de récit que je me sens le mieux en tant qu’écrivain. 

Paco. Durant la première partie de votre roman, le style est très froid, clinique, soit un exposé de faits sur une enquête et ensuite le rythme, le ton devient beaucoup plus vif, intense et personnel avec les propos du personnage principal. Ces deux tons totalement différents étaient essentiels pour vous pour ce récit ?

Jacques Expert. Dans le cas précis, oui. J’aime les histoires qui montent en puissance. 

Paco. Lors de cette fascinante histoire, le lecteur devient témoin d’une rivalité entre deux flics, ou plutôt entre deux hommes qui vont sans doute aller beaucoup trop loin, soit jusqu’à l’obsession, la folie pour l’un d’entre eux. Selon vous, cela peut être une réalité ou cela ne reste que de la fiction… ?

Jacques Expert. C’est une fiction, mais qui est une réalité. Regardez autour de vous : les rapports humains reposent souvent sur la rivalité entre les uns et les autres.

Paco. Un homme incompris, poussé à bout, peut être prêt à tout ? L’injustice, d’un point de vue moral, peut être fatale pour un homme ?

Jacques Exert. Encore une question difficile. Mais j’y réponds de façon catégorique : oui.

Paco. Le lecteur sera le témoin, le spectateur – au 1er rang ! – d’une vraie descente aux enfers d’un homme qui va sombrer dans la folie, nourri d’une obsession sans précédent. Pour vous, tous les paramètres sont là pour finir dans un tel état ? Vous pensez que des personnes comme vous et moi aurions pu réagir de la même manière dans une même situation ?

Jacques Expert. Moi, non… Vous, je ne vous connais pas assez !

Paco. Comme je le mentionne dans ma chronique, le lecteur reçoit une dernière claque avec un dénouement qui fait mal, qui déstabilise et qui nous anéanti. Cette issue, cet épilogue, c’est dur non… ? Selon votre propre regard, cela ne pouvait pas se terminer autrement ?

Jacques Expert. Dans un roman, car je rappelle qu’il s’agit bien d’un roman ( !) il faut soigner la fin. A mon sens il y a trop de Thriller qui, malgré une intrigue de qualité, ont une fin ratée. Dans celui-ci, il y a un double rebondissement qui relance tout. J’espère que cette fin inattendue, mais crédible, donne envie au lecteur de tout reprendre au début. Voyez comme je suis cruel !!

Paco. Toujours par-rapport à cette question et d’un point de vue plus général, êtes-vous très structuré pour l’écriture d’un roman ? Ou alors c’est l’histoire qui vous dirige et qui vous mène dans plusieurs directions possibles.

Jacques Expert. Pour votre info, je ne fais qu’un vague plan, jamais respecté. C’est l’histoire qui me guide. La plupart des rebondissements interviennent pendant l’écriture du livre. J’aime démarrer avec un simple pitch et aller à l’aventure. C’est risqué mais vraiment excitant. 

Paco. Quel regard portez-vous sur ce roman ? Ressentez-vous également ce malaise qui prends le lecteur jusqu’aux tripes ? Ou alors le fait d’avoir créé ce récit vous immunise totalement ?

Jacques Expert. C’est un roman noir mais j’écris des romans noirs. J’espère que cette réponse vous ira !

Paco. Jacques Expert, je vous remercie infiniment pour cet entretien. Peut-être un dernier mot pour vos lecteurs ? Spontanément.

Jacques Expert. Après « Adieu » je vous dit «  à bientôt ! » …

Paco. Encore une toute dernière question en vitesse, avez-vous un projet en cours ? Il me semble avoir entendu que oui…

Jacques Expert. J’écris…